Les vêtements qui font travailler les handicapés

Les Ateliers Manutex de Rouyn-Noranda feraient l’envie de tous les dirigeants d’entreprises. Des employés fidèles, dévoués à l’entreprise et dont la motivation ne peut en aucun cas être remis en doute. Tout ça dans l’industrie du textile! Faut le faire. Son secret? Embaucher des employés ayant des contraintes sévères à l’emploi.

Ils sont bipolaires, schizophrènes, autistes, aveugles ou possédant d’autres troubles mentaux, intellectuels ou physiques. Pourtant, sur la chaîne de montage, tous sont égaux et ont une tâche essentielle à réaliser. Tout au bout de cette chaîne hors du commun, on retrouve des vêtements hautement spécialisés qui habilleront les pompiers forestiers du Québec et de l’Ontario, des travailleurs miniers ou des travailleurs forestiers.

L’entreprise fabrique aussi des sacs en tissu pour faire des courses. Plus de 70 000 morceaux par année seront expédiés partout au Canada et aux États-Unis. Le chiffre d’affaires dépasse le million de dollars. Près de 80 personnes peuvent ainsi vivre la fierté du monde du travail.

Tous ces petits miracles se passent en plus dans une région qui n’a aucune tradition dans le textile. Il fallait être visionnaire et un peu fou pour mener à bien ce projet. Celle à qui l’on doit ce coup de génie est Cécile Grenier une femme dotée d’un sens des affaires redoutable et d’un sixième sens pour voir le potentiel des gens où la plupart jetterait l’éponge.

« Quand on reçoit de nouveaux employés, on se dit parfois que ce sera tout un défi compte tenu de leur vécu. Mais on leur trouve toujours une tâche quelque part. Je me rappelle d’un employé qui est arrivé en fauteuil roulant et qui était paralysé de tout un côté du corps. On l’a installé derrière une machine à coudre et on lui a confié la responsabilité de faire nos coutures droites. Il se servait de son bras paralysé comme appui pour tenir son morceau. Il voulait tellement travailler », raconte Mme Grenier. Voilà le plus grand atout de l’entreprise : des employés motivés qui, pour la plupart, ne pourront jamais oeuvrer ailleurs.

Tenir tête aux Chinois

Bien que les Ateliers Manutex soient un organisme sans but lucratif, l’entreprise doit faire ses frais. La concurrence chinoise est très vive. Il y a quelques années, le carnet de commandes s’est complètement vidé, le principal client ayant transféré sa production en Asie.

« Il fallait absolument trouver de nouveaux clients, sinon on fermait. On s’est retroussé les manches et l’on s’est tourné vers des vêtements à valeur ajoutée, par exemple les vêtements ignifuges. On ne pouvait pas concurrencer des usines chinoises qui fabriquent des millions de paires de bas par année. On a décroché les contrats pour les pompiers forestiers et Falconbridge. Nous travaillons aussi un contrat avec Hydro-Québec. Aujourd’hui, nos vêtements sont présents dans la plupart des mines de la région. Ce virage nous a même permis de prendre de l’expansion. Nous comptons atteindre la centaine d’employés d’ici Noël », indique Mme Grenier.

Cette grande famille que sont les Ateliers Manutex fête cette année son 10e anniversaire. L’expression grande famille n’est pas trop forte quand on sait que la directrice générale elle-même aide les employés à faire leur budget, à bien manger, à prendre leurs médicaments et les accompagne parfois chez le médecin. Ce n’est pas pour rien que Cécile Grenier a été élue Citoyenne de l’année de Rouyn-Noranda en 2005.

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