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Tour d’horizon des grands chantiers d’infrastructures

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Des retombées pour le secteur industriel

Avec en toile de fond la pandémie de COVID-19, le climat économique des derniers mois nous a souvent paru plutôt morose. Pourtant, aux quatre coins du Québec, des travaux majeurs d’infrastructures donnaient du souffle à nos entreprises. Et ce n’est pas fini.

Après la liesse ayant entouré l’inauguration du nouveau pont Samuel-De Champlain en 2019, 2020 a sans contredit été l’année du Réseau express métropolitain de Montréal (REM), un projet de transport en commun innovant et structurant de plus de sept milliards $ avec des retombées significatives pour le secteur industriel.

Pour Pierre Tremblay, président-directeur général de l’Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec (ACRGTQ) qui représente les entrepreneurs et fournisseurs de biens et services québécois qui œuvrent dans la construction de routes, d’ouvrages de génie civil et de grands travaux au Québec, au Canada et à l’étranger, ce chantier représente un point tournant.

« C’est le gros projet qui mobilise. Quand on parle de 7 milliards $, c’est immense », dit-il en entrevue au Magazine MCI. « On a fini Champlain, trois-quatre milliards $ grosso modo. On commence le REM, donc effectivement c’est la grosse pièce au puzzle qui offre beaucoup actuellement à l’industrie. »

Et lorsqu’il parle d’industrie, ce ne sont pas seulement les entrepreneurs en construction qui en bénéficient, mais aussi le secteur industriel et manufacturier d’ici (voir l’encadré sur le REM). « Les retombées pour les entreprises et les travailleurs québécois seront importantes, avec près de deux milliards $ en salaires versés au Québec et plus de quatre milliards $ en contenu local », indique Emmanuelle Rouillard-Moreau, conseillère en communications et relations médias pour le REM.

Du côté de Québec, plusieurs projets d’envergure sont soit sur le point de se mettre en branle ou en attente d’approbation. Le remplacement de l’actuel pont de l’Île-d’Orléans, qui date de 1935, retient évidemment l’attention. On ne connaît pas encore les coûts exacts liés à l’érection du nouveau pont à haubans, mais ils devraient atteindre quelques centaines de millions $. La date initiale de mise en service avait été fixée à 2027, mais pourrait être devancée si le projet de loi 66 du gouvernement de la CAQ visant l’accélération de certains travaux d’infrastructure voit le jour.

« Le pont de l’île d’Orléans fait partie des projets que le gouvernement veut devancer », note l’expert de l’ACRGTQ.

Les projets du troisième lien entre Québec et sa Rive-Sud et du tramway de Québec sont toujours liés à des enjeux de nature politique ou d’évaluations environnementales, mais leur matérialisation éventuelle est prometteuse sur le plan économique.

Plus au nord dans la région du Saguenay, c’est le projet de terminal méthanier de GNL Québec qui est à surveiller. Les questions environnementales sont toujours au cœur des discussions entourant ce projet de liquéfaction de gaz naturel destiné à l’exportation. « Le projet repose sur un investissement évalué à 9 milliards de dollars et devrait être opérationnel en 2026 », écrit le promoteur Énergie Saguenay sur son site Web.

De retour dans la région de Montréal, on garde un œil attentif sur la réfection majeure du pont Pie-IX, qui relie la métropole à Laval. « Le pont requiert une intervention majeure. Les dalles en béton ont atteint la fin de leur vie utile et doivent être remplacées, de même que les poutres d’acier, dont les propriétés ne respectent pas les normes actuelles », indique le ministère des Transports du Québec. Ce pont a une cinquantaine d’années et sa remise à neuf impliquera des dépenses d’environ 200 millions $.

Mais pour les automobilistes qui ont à subir les affres de la circulation chaotique à Montréal, c’est sans contredit la fin du chantier de l’échangeur Turcot qui est la plus attendue au cours des prochains mois. Les sommes investies dans ce projet tentaculaire sont évaluées à 3,7 milliards $. « Certains échéanciers vont être un peu reculés par le fait que la COVID nous a un peu ralentis au printemps dernier, mais c’est un projet qui est en fin de travaux », constate le porte-parole des constructeurs et experts en génie civil, soulignant d’autre part que le prolongement éventuel de la ligne bleue du métro de Montréal est également dans la mire de l’ACRGTQ.

Hors des grandes villes sur la Côte-Nord, les commandes de béton, d’armatures d’acier et de composantes électriques et électroniques diverses ont aussi grandement bénéficié à l’économie, alors que les travaux de la quatrième phase des centrales hydroélectriques de la rivière Romaine entrent dans leur sprint final.

« Pour des régions comme la Côte-Nord, c’est leur REM à eux », déclare M. Tremblay au sujet de la centrale Romaine-4. Et les retombées locales sont en effet bien palpables, confirme André Frigon, gérant de projets chez Hydro-Québec. En entrevue au Magazine MCI, M. Frigon souligne que rien que pour l’année 2020 et uniquement pour la Romaine-4, Hydro a octroyé pour 144 millions $ de contrats.

Plus de 99 % de tout le chantier de la Romaine-4 est approvisionné ou construit par des entreprises québécoises, précise M. Frigon. Et cela inclut les quelque 20 000 mètres cubes de béton québécois qui ont été nécessaires à la construction. « Là on a les murs et on a un toit. Maintenant on s’en va à l’intérieur pour faire toute la mécanique électrique de cette centrale-là », dit-il au sujet de la Romaine-4 et des groupes turbine-alternateur et systèmes auxiliaires qui demeurent à mettre en place.

La compagnie Grimard, de Laval (systèmes de contrôle) et Delstar Énergie, de Montréal (pôles de rotors) figurent parmi les industries qui ont contribué au projet et ce sont aussi des fournisseurs québécois qui ont fourni l’acier des pylônes pour le transport de l’énergie, ainsi que celui utilisé pour ce qu’il est convenu d’appeler les « conducteurs », soit les câbles électriques aériens. (Voir l’encadré sur Hydro-Québec pour plus de détails sur les chantiers à venir de la société d’État.)

Le réseau routier provincial

Outre les mégastructures évoquées plus haut, c’est partout au Québec sur le réseau routier du MTQ qui s’étend sur 30 000 km et compte 9 500 structures (ponceaux, viaducs, etc.) que des travaux d’infrastructures se poursuivent afin de maintenir en état nos voies carrossables. Et c’est sans compter les 70 000 km de routes gérées par les municipalités.

Tous ces travaux routiers bénéficient à la centaine d’usines de béton du Québec et environ 200 usines d’asphalte réparties sur notre territoire. « La beauté de la réfection [routière], c’est que les retombées sont très québécoises et très locales », souligne M. Tremblay, donnant l’exemple suivant : « Je ne peux pas produire une tonne d’asphalte à Montréal et aller l’étendre en Gaspésie. Techniquement parlant, on ne peut pas. »

C’est que l’asphalte, qui sort de l’usine à environ 175o C, doit être appliqué à une température d’environ 100o C. Pour y arriver, il importe ainsi que la matière ne soit transportée que sur de courtes distances. C’est la raison pour laquelle, à peu près où qu’on soit au Québec on trouve une usine d’asphalte dans un rayon d’environ 50 kilomètres.

La place des entreprises québécoises

De façon générale, indique M. Tremblay, les travaux routiers ont des retombées bien réelles sur le secteur industriel québécois, au-delà de l’asphalte et du béton. On peut penser aux gens qui fabriquent le contreplaqué utilisé pour les coffrages de béton, aux carrières dont sont extraits les pierres et granulats ou encore aux professionnels de l’acier qui fournissent les tiges d’armature du béton et autres poutrelles de structures. L’entreprise beauceronne Canam y fait d’ailleurs très bonne figure.

Là où le marché est plus occupé par des firmes étrangères, c’est souvent dans les secteurs des composantes électriques ou électroniques, dit M. Tremblay, faisant notamment référence aux panneaux à affichages variables qui surplombent nos axes routiers ou encore aux systèmes de contrôle du REM.

Cela signifie qu’il y a des opportunités d’affaires à saisir pour les entreprises d’ici, parce que l’expertise est là. On peut penser entre autres à la firme Orange Traffic, de Mirabel, active dans le secteur des transports intelligents.

Il faut toutefois garder à l’esprit que le Québec et le Canada évoluent au sein d’une économie mondialisée et que, si l’on se félicite lorsqu’une entreprise québécoise s’illustre dans un projet d’infrastructure à l’international, il faut en contrepartie accepter que l’inverse se produise aussi.

Et lorsque c’est le cas et qu’un maître d’œuvre étranger obtient un contrat d’infrastructure ici, cela ne veut pas dire que nos entreprises sont nécessairement laissées de côté. Elles peuvent en effet très bien s’intégrer à des consortiums internationaux, comme l’a fait EBC Inc. de L’Ancienne-Lorette pour le nouveau pont Champlain, cite en exemple M. Tremblay. Selon lui, il y a transfert de connaissances à la rencontre de partenaires étrangers et cela peut être fort positif pour les entreprises d’ici.

Parmi les industries d’ici qui ont bénéficié et contribué au projet Champlain, on note Everest Equipment Company d’Ayer’s Cliff (moules des éléments préfabriqués), Acier AGF de Longueuil (acier d’armature), Béton Bourgeois de Contrecœur, Béton Préfabriqué du Richelieu de Saint-Jean-sur-Richelieu et Béton Préfabriqué du Lac, d’Alma (toutes trois pour des éléments de béton préfabriqué) ainsi que le Groupe Canam, de Saint-Georges en Beauce (superstructure en acier des approches du nouveau pont et du pont de L’Île-des-Sœurs).

COVID-19 et échéanciers

Comme dans tous les autres secteurs d’activité, la pandémie de COVID-19 et les épisodes de confinement – total ou partiel – ont affligé l’avancée des travaux d’infrastructures.

Dans l’ensemble toutefois, les intervenants de nos grands chantiers ont trouvé moyen de composer avec le virus sans trop compromettre les échéanciers de réalisation.

L’impact s’est surtout fait sentir lors de la première vague, alors que toutes les mesures sanitaires étaient à mettre en place afin de s’assurer que les employés soient en sécurité tout en demeurant productifs, explique M. Tremblay. « On parlait de distanciation, on parlait de port de gants, de masques, de lunettes, etc. Juste l’enregistrement le matin pour être capables de déterminer si on est malade ou pas, il fallait le faire et ça ne faisait pas partie des pratiques auparavant. »

Heureusement en génie civil, les travaux se font essentiellement à l’extérieur où la distanciation physique fait déjà partie de la réalité. La météo a aussi été favorable pendant la saison estivale, donc des journées de pluie en moins ont permis de récupérer du retard. La flexibilité des intervenants qui ont travaillé de nuit ou les week-ends a aussi contribué à atténuer les impacts négatifs de la pandémie sur le respect des échéanciers.

« Le cumul de ces possibilités-là a compensé jusqu’à un certain point les retards de cinq-six semaines du printemps et de l’implantation des mesures [sanitaires] », résume le porte-parole de l’ACRGTQ.

Les retombées du REM

Selon la porte-parole Emmanuelle Rouillard-Moreau, 86 % des contrats d’approvisionnement octroyés pour le projet du REM par NouvLR ont été signés avec des entreprises du Québec et près de 98 % avec des entreprises canadiennes. Parmi celles-ci :

  • Bétons Préfabriqués du Lac (Alma)
  • Canam Ponts Canada
  • L.A. Hebert
  • Acier AGF
  • Camille Blais & Fils
  • Armatures Bois-Francs
  • Otis Canada
  • Solmatech
  • La Cie Électrique Britton
  • Unibéton, une division de Ciment Québec

Outre le réseau de transport lui-même, le projet du REM a emmené dans son sillage la création d’un pôle d’excellence et d’expertise en transport collectif automatisé au Québec.

par Eric Bérard

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