À l’Association des fabricants de meubles du Québec (AFMQ), l’industrie avait réussi à s’ajuster à la concurrence des pays émergents et à l’appréciation du dollar canadien, mais la crise économique actuelle vient perturber les activités.
«La personnalisation de masse demeure l’un des grands avantages pour les fabricants de meubles québécois. C’est un créneau dans lequel nous excellons et sommes capables de nous distinguer de la production asiatique en offrant la possibilité au consommateur de donner une touche de personnalisation au produit qu’il entend acheter. Un autre élément clé: assurer une livraison rapide et fabriquer en petites quantités», indique Jean-François Michaud, président de l’AFMQ.
De son côté, l’École des métiers du meuble de Montréal assure que la crise touche davantage les meubles de bas et moyen de gamme. «Au contraire, les employeurs n’arrivent pas à trouver du personnel qualifié pour travailler dans le secteur du haut de gamme. Il s’agit d’une clientèle qui recherche des meubles personnalisés», soutient Jean-Yves Branger, enseignant en ébénisterie à l’institution scolaire. L’École assure un programme annuel en ébénisterie à 120 élèves au terme duquel ces derniers reçoivent un diplôme d’études professionnelles (DEP).
Pour M. Branger, il ne fait aucun doute que le Québec est bien positionné. «Nous sommes différents des Américains et même du Canada anglais. Nos façons de faire sont uniques comme le style et le design; ici, nous sommes sensibles à ces atouts. C’est une force, c’est quelque chose que je veux approfondir en général».
Au MDEIE, on estime que la crise économique amène les détaillants américains à reconnaître peu à peu les avantages de pouvoir compter sur des fournisseurs à proximité, fiables et rapides afin de réduire leurs stocks. «Lorsque la clientèle se dérobe, les gros inventaires d’Asie finissent par coûter très chers. À notre avis, cette crise économique va permettre au secteur du meuble résidentiel de mieux faire valoir ses nombreux avantages vis-à-vis les concurrents à faibles coûts de main-d’œuvre».
Selon le Ministère, les fabricants américains de meubles ont déplacé jusqu’à 70% de leur production en Asie. Or, à ce rythme, Québec estime que les manufacturiers d’ici vont devenir les producteurs de meubles de l’Amérique. Toutefois, trois conditions sont essentielles pour atteindre l’objectif: la qualité, les créneaux de niche de marché et la proximité des détaillants permettant d’offrir le juste-à-temps.
Parmi les enjeux des prochaines années, Québec affirme qu’il y a également un potentiel non négligeable qu’offre la vente par Internet. «L’Internet offre beaucoup de possibilités qui sont à notre avis encore très peu utilisées par nos manufacturiers. L’utilisation de logiciels en vue de visualiser des configurations de mobiliers personnalisables permettrait à l’industrie du meuble québécois de se démarquer. Le développement d’une telle plate-forme électronique pour la commercialisation offrirait aux consommateurs une nouvelle expérience d’achat de mobiliers».
Au cours des cinq dernières années, les technologies qui ont été largement utilisées et appelées à se développer davantage reposent sur la vision artificielle, l’optimisation du débitage primaire et secondaire et l’automatisation. Cela a permis de mettre au point une base solide pour agir directement dans le procédé de fabrication de meubles.
Un autre aspect fondamental sur la commercialisation: celui de l’impact des technologies de l’information et des communications. «Un fabricant peut désormais se détacher jusqu’à un certain niveau d’un réseau de vente et utiliser le vaste potentiel de promotion qu’offre l’Internet». Le MDEIE soutient même que l’on assistera prochainement à l’intégration des «Agents de Commerces Virtuels» à la stratégie de vente des fabricants de meubles.
Dans l’industrie du meuble de bureau, contrairement au mobilier de maison, les livraisons manufacturières ont affiché une croissance annuelle moyenne de 4,7% entre 2002 et 2007. En fait, depuis ces dernières années, il y a eu mouvement de concentration/consolidation des entreprises de cette niche, ce qui a ouvert les portes tout particulièrement à huit entreprises qui dominent le marché. Les deux principales sont le Groupe Lacasse et Teknion Roy & Breton. Elles réalisent des revenus supérieurs à 100M$. Les autres sont Artopex-Plus, Manufacturier Patella, Bestar, Mobilier de bureau Logiflex, Montel et Rousseau métal.
Malgré une croissance de 6,8% en 2008, les prévisions d’Aktrin entrevoient un taux de croissance négatif en 2009 et 2010 en raison des taux d’inoccupation d’espaces de bureau dans la plupart des grands centres américains.
Cependant, le MDEIE tient à préciser que la forte concentration de ces entreprises dans le mobilier de bureau diminue leur vulnérabilité pour ce qui est des coûts de production. «En effet, ces entreprises sont beaucoup plus avancées technologiquement dans leurs systèmes de production que celles dans le meuble résidentiel. Leur haut degré d’automatisation leur permet d’avoir beaucoup moins besoin d’effort de main-d’œuvre pour la fabrication de mobiliers».
Le MDEIE soutient que ce secteur sera toujours très concurrentiel face aux pays à faibles coûts. Produit principalement en panneaux de particules, le mobilier de bureau est plus simple à travailler que le meuble résidentiel en bois dur.
Selon les données 2008 du Système de classification des industries de l’Amérique du Nord (SCIAN), l’industrie du meuble en général compte quelque 22 000 travailleurs répartis dans plus de 1 432 entreprises au Québec, dont plusieurs d’entre elles sont artisanales, c’est-à-dire 10 employés et moins. La Montérégie et Montréal sont les deux premières régions où l’on compte le plus grand nombre de travailleurs avec 257 et 198 respectivement.