Visant l’utilisation de cinq types de pesticides précis, la stratégie gouvernementale 2015-2018 vise à protéger la santé humaine et l’environnement, mais aussi à minimiser l’impact sur les pollinisateurs, comme les abeilles, dont la population, indispensable à l’homme et à la biodiversité, décroît à vitesse grand V. Elle cible notamment des pesticides à base de néonicotinoïdes, ainsi que deux autres molécules dont les effets néfastes sur la santé humaine, les poissons, les oiseaux et les amphibiens sont bien connus, l’atrazine et le chlorpyrifos. Sans être complètement bannie, à l’instar de réglementations existant dans d’autres pays, l’utilisation de ces pesticides devra désormais être approuvée par un agronome membre de l’Ordre des agronomes du Québec (AOQ).
Selon un communiqué émis pas Équiterre, le 5 mars dernier, une nouvelle émanant du Groupe de travail sur les pesticides systémiques, publiée ans le journal scientifique Environmental Science and Pollution Research, conclut que ces pesticide ne sont pas aussi efficaces qu’on le croyait. Plus encore, ils sont inutiles dans la grande majorité des cas. Des alternatives beaucoup plus efficaces et moins coûteuses existent.
Toujours selon l’organisme, un modèle, développé en Italie, permet d’établir quels champs sont susceptibles de présenter des problèmes liés aux ravageurs et de faire les choix appropriés quant aux stratégies pour les combattre. Dans certaines régions, on en vient à la conclusion que 96% des champs de maïs ne nécessitent aucun épandage d’insecticides.
Lors de l’annonce de la ministre Melançon, certains intervenants ont applaudi l’effort supplémentaire du gouvernement. C’est le cas, entre autres, de la Fédération des apiculteurs du Québec.
« La Fédération se réjouit des mesures annoncées aujourd’hui. Elles devraient permettre de restaurer la santé de nos cheptels de pollinisateurs, remettre nos entreprises apicoles sur la voie de la rentabilité et garantir une production locale abondante en aliments de qualité », a précisé son président, Stéphane Leclerc.
Même son cloche du côté de la coopérative Citadelle, par l’entremise de son président, Michel Labbé.
« Depuis quelques années, la survie des abeilles est menacée. La coopérative soutient donc la mise en œuvre de cette règlementation qui lui permettra d’offrir à sa clientèle un produit apprécié pour sa pureté, son goût exquis et sa qualité constante. »
Toutefois, il en va tout autrement pour d’autres producteurs, actifs dans différents secteurs agricoles. Pour les Producteurs de grains du Québec (PGQ), l’annonce faite pourrait représenter des pertes importantes pour ses membres.
« Avec ce règlement, nous serons justifiés d’appliquer des néonicotinoïdes seulement si le dépistage indique que le ver fil-de-fer, un ravageur qui s’attaque au maïs, est suffisamment présent pour occasionner une perte de rendement de plus de 5%. Selon cette loi, une baisse inférieure à 5% ne serait pas dommageable et ce serait aux producteurs à l’assumer. À titre d’exemple, en Montérégie-Ouest, des pertes de 5% représentent 600 kilogrammes de moins de maïs ou grains par hectare. Nous évaluons de telles pertes à 120$ l’hectare », explique Christian Overbeek, président des PGQ.
Afin de contrer de telles pertes, le gouvernement s’engage néanmoins à verser une aide de 14 M$ sur cinq ans. Mais, en ne considérant que l’importance de producteurs de grains au Québec, eux qui sont plus de 11 000 sur le territoire québécois, générant 1,3 G$ en chiffre d’affaires à partir d‘un million d’hectares, cette aide est nettement insuffisante.
« Nous parlons ici d’environ 3 M$ par année. Comme les producteurs de grains occupent 1 million d’hectares, ce programme représente une aide d’un peu moins de 3$ l’hectare, alors que les pertes sans compter les frais de certification agronomique pourraient être quarante fois plus importantes. Nous sommes en accord avec la réduction e l’utilisation des pesticides mais, dans un contexte mondial, nous devons demeurer compétitifs », poursuit Christian Overbeek.
Depuis quelques années, le CÉROM, le Centre de recherche sur les grains, a mené plusieurs recherches importantes. Effectuées de façon parcellaire sur le terrain, ces recherches ont permis de mettre en évidence un ensemble de paramètres.
Par Richard Marcil