Un virage puisque, au Québec, l’ensemble de la biomasse – qui correspond à 10% de la consommation totale d’énergie de la province – est principalement utilisé par les secteurs industriel (68%) et résidentiel (31%).
Dans ce domaine, le Bas-Saint-Laurent a un vaste programme d’ici deux ans. La Conférence régionale des élus (CRÉ) de cette région a mis en place une stratégie de développement d’une dizaine de petites centrales communautaires à haut rendement énergétique et environnemental.
«Une chaufferie centrale pourrait par exemple permettre à un village de chauffer un réseau de bâtiments comme une école, une église, un centre communautaire, etc… La biomasse forestière est un combustible d’avenir et sa valorisation est incontournable au Bas-Saint-Laurent», souligne monsieur Michel Lagacé, président de la CRÉ.
À Mont-Carmel dans le Kamouraska, dès l’achat de la chaudière, le projet ira de l’avant. «Nous faisions une économie de 35% l’an passé par rapport à l’huile à chauffage. Cette année, avec la hausse de l’huile, l’économie sera de 45 à 50%», explique Robert Bérubé, directeur général de cette municipalité de 1 200 habitants située dans la MRC de Kamouraska.
À Amqui dans la vallée de la Matapédia, une étude de faisabilité avec des partenaires du monde scolaire et du réseau de la santé sera déposée au plus tard en mars, avec comme principal objectif de calculer la biomasse disponible sur une longue période. Le coût de chauffage à la biomasse pour le réseau municipal serait de 37 141$ au lieu de plus de 60 000$ avec le mazout.
Les chaufferies centrales à la biomasse permettent l’utilisation de résidus d’opérations forestières (houppiers, branches, souches) qui restent sur les parterres de coupe et qui ne sont pas attribués dans les contrats d’approvisionnement et d’aménagement forestier (CAAF).
L’utilisation de la biomasse forestière favorise ainsi une gestion forestière durable, en plus d’engendrer des économies et de développer l’activité économique locale.
«La motivation environnementale est grande dans ce genre de projet puisque les nouveaux procédés de chaufferie sont à émission zéro de C02», exprime Richard Savard, responsable du dossier forêt à la CRÉ du Bas-Saint-Laurent.
Les chaufferies centrales au bois permettent aussi de lutter contre le réchauffement climatique. En effet, le CO2 émis par la combustion du bois est compensé par les quantités stockées lors de la croissance des forêts, d’où un bilan carbone nul. Le bois vient se substituer aux énergies fossiles comme le mazout, émetteur de gaz à effet de serre. En plus de diminuer nos émissions de gaz à effet de serre, l’utilisation de résidus forestiers est créatrice de richesse.
La construction de ces petites centrales génère non seulement des emplois en forêts pour la récolte de la biomasse, mais aussi dans le secteur du transport, du fonctionnement et de l’entretien des centrales.
Selon Industrie Canada, les ressources canadiennes en biomasse forestière s’élevaient à plus de 26 milliards de tonnes anhydres en 1993 – l’équivalent de 82 millions de barils de pétrole – assez pour répondre aux besoins en pétrole du Canada pour 151 ans (au taux de consommation de 1993). Le Canada disposerait de plus de ressources en biomasse par habitant que n’importe quel autre pays de la planète.
Au Canada, l’énergie de la biomasse dépasse actuellement celle produite par le charbon (pour les applications de génération non électrique) et par l’énergie nucléaire. Elle représente 5% de la consommation d’énergie secondaire du secteur résidentiel et 17% de celle du secteur industriel, surtout dans les industries forestières et 35% de la consommation totale d’énergie au Canada si on inclut le bois d’oeuvre et les pâtes et papiers.
Les industries forestières augmentent aussi de plus en plus leur consommation de déchets de bois, auparavant brûlés ou enterrés, surtout pour chauffer les chaudières des usines de pâtes et papiers et produire la chaleur industrielle et l’énergie nécessaires au séchage du bois.
Le phénomène est mondial, puisque tous les pays sont confrontés à la hausse vertigineuse des coûts de l’énergie. La Finlande prévoit que la production de bioénergie va représenter dans les prochaines années 20% du chiffre d’affaires de l’industrie forestière. 45 centrales de cogénération hors industrie fonctionnent déjà dans ce pays nordique. Plus près de nous au Vermont, une vingtaine d’écoles publiques sont chauffées par de la biomasse forestière.