À l’Association pour le Développement de l’Industrie Chimique Québécoise (ADICQ), on estime qu’il faut valoriser le secteur de la chimie. Ce n’est plus comme il y a vingt ans. « Il y a des entreprises qui font de la chimie, mais ne veulent pas être associées à l’industrie chimique car il semble que les mots « industries chimiques » ne soient pas très « marketing » en ce moment. Les gens ont besoin de la chimie, elle est omniprésente dans leur vie et essentielle à leur confort et mode de vie », indique Caroline Piché, directrice générale de l’ADICQ.
Selon une étude toute récente de KPMG, le Québec est la région la plus abordable où faire des affaires au Canada.
L’étude démontre que la province demeure parmi les 20 champions en matière de dépenses en recherche et développement. Et l’industrie des produits chimiques et de la pétrochimie n’y échappe pas.
L’ADICQ soutient que le Québec est très concurrentiel dans les produits de nettoyage. Ce qui est le cas pour des entreprises comme Choisy, Lavo, SaniMarc et Sany. Les produits sont biodégradables en moins d’un mois selon les normes de l’OCDE. D’autres entreprises connaissent une croissance intéressante telle Enerkem, qui produit de l’éthanol depuis des déchets.
De son côté, la directrice générale de Coeffiscience, comité sectoriel de la main-d’œuvre en chimie et pétrochimie, Danielle Dunn, soutient que l’industrie a plusieurs défis à relever et qu’elle est sur la bonne voie pour conserver sa place concurrentielle par rapport à l’Asie. « Il faut développer de nouveaux marchés, améliorer les échanges d’informations entre les industries, améliorer l’image de la chimie pour attirer un plus grand nombre de jeunes, miser sur l’approche écologique, développer de nouveaux partenariats entre les syndicats, employeurs, entreprises et communautés et augmenter la capacité d’innovation. »
Selon les dernières statistiques fournies par Coeffiscience, il y avait 626 entreprises et 19 000 travailleurs dans l’industrie des produits chimiques et de la pétrochimie en 2008 au Québec. « Il y a beaucoup de potentiel de développement et les entreprises se sont prises en main pour s’adapter à la réalité d’aujourd’hui. Les décideurs sont très conscients du tournant environnemental et d’y apporter une valeur ajoutée pour mieux concurrencer des pays comme la Chine où les coûts de la main-d’œuvre sont moins élevés. Elle doit se donner une image plus conforme à ce qui se fait actuellement comme progrès », ajoute Danielle Dunn.
Selon Investissement Canada, Montréal abrite une grappe d’industries pétrochimiques intégrées comptant des raffineries de produits pétroliers, un terminal de navires citernes pour le transport maritime et offre un accès direct aux grands marchés de l’Est et du Centre des États-Unis et du Canada. De nouveaux investissements effectués ont permis le développement d’une chaîne de valeur des hydrocarbures aromatiques, la ville est le siège d’une trentaine d’entreprises actives dans la fabrication de produits pétrochimiques primaires, d’oléfines et d’hydrocarbures aromatiques.
Pour Marius D’Amboise, professeur titulaire, département Chimie, à l’Université de Montréal, la recherche et le développement sont deux éléments incontournables. Bien que ce soit en déclin au Québec comme partout ailleurs au Canada et chez nos voisins du Sud, celui-ci nuance en précisant un élément positif.
« Malgré tout, c’est ici qu’on investit le plus en R-D par rapport au Canada. Disons que c’est l’industrie qui investit le plus. Le gouvernement n’injecte pas de fonds ou presque. Dans le dernier budget, on y consacrait seulement 135 M$. »
À son avis, l’industrie innove beaucoup. Et pour lui, il faut investir encore plus dans les nanotechnologies. « Elles sont très prometteuses dans le secteur de la décontamination. Ce qui est le cas pour les nanoparticules de fer et de cuivre qui peuvent servir plus efficacement et plus rapidement. Par exemple, un terrain contaminé. On n’a pas à extraire le sol pour effectuer la tâche, mais simplement d’y répandre des nanoparticules. Avec quelques kilogrammes, on peut obtenir les mêmes résultats pour quelques centaines de dollars au lieu d’y injecter 1 M$ pour décontaminer le terrain de façon conventionnelle. »
Marius D’Amboise précise qu’il existe quelque 1 000 produits qui découlent des nanotechnologies, dont une large proportion est utilisée dans les cosmétiques. « C’est un secteur prometteur, des percées majeures sont à venir et beaucoup de recherches se déroulent en ce sens au CHUM. »
La chimie est présente partout. Elle fait partie de notre quotidien, dit Marius D’Amboise. « Lorsqu’il y a un problème environnemental, c’est bien souvent les chimistes qui trouvent la solution. Bien que l’industrie ait causé des problèmes environnementaux dans le passé, ce sont les chimistes d’aujourd’hui qui se préoccupe de cette question. Pensons seulement au remplacement du plastique par du plastique biodégradable. C’est grâce à des recherches en laboratoire que nous sommes parvenus à trouver une solution. »
Pour Danielle Dunn de Coeffiscience, tout se déroule dans un contexte de mondialisation. Le Québec dispose de ressources naturelles appropriées, d’un coût d’énergie abordable et d’une qualité de main-d’œuvre de haute qualité pour se tailler une place enviable. Elle ajoute que le Québec dispose de très bons établissements scolaires pour la formation de techniciens en procédés chimiques.
Bien que la fermeture de la raffinerie Shell ait ébranlé le milieu de la pétrochimie à Montréal, d’autres voies s’ouvrent pour l’avenir de l’industrie. Il suffit maintenant à celle-ci de s’adapter aux nouveaux besoins, aux nouvelles tendances pour réussir, ce qui ne fait aucun doute dans l’esprit des intervenants du milieu.