Comme toujours, les enjeux sont élevés. La communauté scientifique prévient avec toujours plus de précisions que nous devons éviter d’atteindre un seuil de réchauffement planétaire estimé à 2° C de plus qu’à l’ère préindustrielle, autrement cette température serait catastrophique pour la survie de l’être humain et rendrait alors futile les actions pour la contrer. Une coordination politique des efforts internationaux est plus que jamais nécessaire, car au rythme où nous polluons, nous atteindrons ce seuil d’ici quelques décennies.
Ces négociations internationales sur le climat ne datent pourtant pas d’hier. Depuis le Sommet de la terre à Rio de Janeiro en 1992, les nations du monde se sont entendues, en formant la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, à prendre des actions concrètes pour lutter contre le réchauffement menaçant.
Si la solution aux dérèglements climatiques doit nécessairement passer par le politique, le progrès se fait lent et parfois tortueux. Souvenons-nous du protocole de Kyoto, produit en 1997, engageant les pays signataires à couper de 5 % leurs émissions de GES par rapport au niveau de 1990. Celui-ci aurait pu, surtout grâce à sa force de loi annoncée, conduire à une avancée significative.
Cet espoir, nous le savons, a été déçu, notamment en raison du fait que les États-Unis ne l’ont pas signé, que les pays en voie de développement jouant un rôle clé dans les émissions de GES n’aient pas reçu les mêmes cibles de réduction, pourtant non négligeables, et finalement qu’aucune sanction n’a été appliquée aux signataires n’ayant pas accompli leur mandat.
Ainsi, c’est un nouvel accord très ambitieux sur les engagements de réduction des émissions qui est attendu à Paris. Non pas un frein nous permettant de gagner une ou deux années avant d’atteindre le seuil fatidique, mais bien des contributions mondiales radicalement plus élevées. Bref, ce qu’il faudrait relève un peu du miracle.
Or, peut-on sincèrement s’attendre à un tel changement de cap tout en ayant une attitude indulgente face aux plus grands pollueurs? Il faut croire que certains dirigeants français sont de cet avis. En effet, cette fameuse COP-21 sera financée à environ 20 % par le secteur privé, dont des multinationales telles qu’Air France, Renault-Nissan, BNP Paribas, qui n’ont pas jusqu’à ce jour été des plus favorables à une économie verte.
Sans surprise, cette décision a choqué plusieurs ONG, notamment Oxfam France. Cette dernière y voit une opportunité d’éco blanchiment pour ces entreprises. Il faut savoir que l’éco blanchiment est une stratégie de communication utilisée par des entreprises afin de se donner une image écologique sans que cela se traduise proportionnellement dans leurs actions.
Cette inquiétude ne provient pas seulement du fait qu’il s’agit, pour la plupart des commanditaires privés du COP-21, de gros pollueurs, mais également en raison de ce qui s’est déroulé lors de la COP-19 de 2013 en Pologne. En effet, la COP-19 avait aussi, mais pour la première fois, été commanditée par de grandes entreprises privées favorables aux énergies sales. Or, ce qui est inquiétant et qui avait soulevé la controverse, tient surtout du fait que ces mécènes ont eu du coup accès à la table des négociations.
S’il n’y a rien de mal a priori à ce qu’une entreprise cherche en premier lieu à faire du profit, il est contre-productif que ce partenariat fasse de la pression aux politiciens pour que les solutions équitables en matière de climat atteignent les avantages recherchés des plus gros pollueurs.
Oui, une entente à la COP-21 sera plus prometteuse si elle est économiquement viable, toutefois, le miracle tant attendu ne se produira pas dans une économie toujours aussi dépendante aux énergies sales.
Emmanuelle Gauthier-Lamer Enseignante en philosophie, Collège de Valleyfield