Par Eric Bérard
Présenté par les Salons Industriels
La firme montréalaise de solutions technologiques Novipro a mandaté la firme Léger afin sonder des décideurs du pays et d’établir le portrait et les tendances en matière de technologies de l’information (TI) des petites, moyennes et grandes entreprises.
Ce coup de sonde met en lumière la profonde influence des pressions socio-économiques sur les organisations, dont l’inflation, qui a influencé 69 % des entreprises à repenser leurs décisions relatives aux investissements technologiques.
« L’inflation a énormément affecté les entreprises », dit Martin Pelletier, chef de la stratégie chez Novipro, à l’occasion d’une entrevue accordée au Magazine MCI. Il ajoute que les hausses de taux d’intérêt ont également eu un impact sur les investissements en TI.
Les engagements financiers technologiques prévus par les organisations sont au plus creux des six dernières années.
Les trois quarts des répondants (76 %) planifient déployer des investissements technologiques, contre 92 % avant la pandémie, en 2019. L’étude révèle qu’en plus de l’inflation, le télétravail, la pénurie de main-d’œuvre, la récession, les catastrophes environnementales et les tensions internationales ont chamboulé les décisions des entreprises en la matière.
Bien que 54% des entreprises affirment avoir obtenu des résultats positifs en implantant l’analyse de données avancées et l’intelligence artificielle (IA), seulement 13% des entreprises canadiennes prévoient y investir d’ici les deux prochaines années, comparativement à 36 % en 2019.
Selon notre invité, l’IA peut pourtant rendre de grands services au secteur manufacturier, notamment pour faire face aux pirates informatiques. « L’intelligence artificielle va probablement aider les entreprises à voir ou à prévoir les attaques. Au niveau de la cybersécurité, pour la protection, l’IA va sûrement jouer un rôle très important », indique M. Pelletier.
Pas le temps de sauver du temps
Les objectifs principaux cités pour ces investissements technologiques importants ont un impact clair sur la main-d’œuvre, soit en augmentant la productivité (30 %) et en remplaçant les tâches manuelles par la technologie (18 %).
Paradoxalement, il semble que les entreprises retardent leurs investissements à cause des enjeux actuels qu’elles tentent de résoudre. Le manque de ressources (31 %) et l’inflation (21 %) sont énumérés parmi les principaux freins à l’adoption.
« Je suis en sous-effectifs, je n’ai même pas le temps de penser à ça et de l’analyser. Je sais que ça pourrait peut-être aider, mais en ce moment j’ai des contremaîtres qui font deux quarts de travail pour pallier à la production », est la réponse type que M. Pelletier dit entendre sur le terrain.
La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI) tend à lui donner raison. Une récente étude de l’organisation a en effet démontré que les propriétaires d’entreprises qui travaillent plus d’heures en raison des pénuries de main-d’œuvre le font 59 heures par semaine, dont 20 pour compenser le manque de personnel. Autrement dit, 34 % de leurs heures travaillées servent à pallier le manque d’employés.
Cybersécurité
De retour au sondage Léger, les entreprises mentionnent que les facteurs qui les ont le plus amenées à revoir leurs pratiques en matière de sécurité sont le télétravail (65 %) et la pénurie de la main-d’œuvre (56 %). Malgré cela, les mises à jour en solutions de sécurité baissent. Cela se manifeste, entre autres, par une diminution de l’offre de formations en sécurité aux employés (59 %) comparativement à 74 % en 2019.
Selon M. Pelletier, il reste du chemin à faire en la matière puisque 67 % des répondants au sondage n’ont pas à demander une autorisation pour installer un logiciel.
« Lorsqu’on considère qu’une entreprise sur quatre a été victime d’une menace informatique et que 57 % d’entre elles ont payé la rançon qui engendre des coûts de plus de 500 000 $ dans 25 % des cas, la négligence en cybersécurité est bien plus qu’une affaire de réputation », témoigne son collègue Alain Cormier, directeur exécutif, développement des affaires, chez Novipro.
Variations selon les provinces
L’Ontario est la province canadienne dont les entreprises ont été les plus touchées par l’inflation. Seulement une entreprise sur cinq y affirme n’avoir subi aucun impact des turbulences économiques. À l’autre bout du spectre, les entreprises québécoises sont celles qui semblent s’en être le mieux tiré.
C’est l’inverse en matière de recrutement de main-d’œuvre en TI. Parmi toutes les provinces, le Québec connaît considérablement plus de difficultés à pourvoir des postes en TI alors que l’Ontario est celle qui a le plus de facilité.
Toujours en entrevue, M. Pelletier explique qu’en raison de la langue, les entreprises de l’Ontario peuvent recruter partout au Canada, ce qui n’est pas nécessairement le cas de celles du Québec.
« Le bassin est beaucoup plus restreint », dit-il pour expliquer cet écart.