Le secteur manufacturier est au cœur du développement économique régional, alors qu’il représente un vecteur économique essentiel pour le Québec et constitue la base même de l’approvisionnement des Québécois. Les 24 000 entreprises manufacturières, présentes à travers toutes les régions de la province, génèrent à elles seules 165 milliards de dollars de ventes, soit près de 15 % du PIB du Québec.
Le secteur manufacturier, c’est également la colonne vertébrale des exportations du Québec, rassemblant à lui-seul 89 % des exportations québécoises. Ce sont enfin près de 500 000 emplois directs, 500 000 travailleurs qui font tourner tous les jours l’économie et s’assurent que, de la table jusqu’aux entrepôts des grands donneurs d’ordre, le Québec dispose de biens essentiels.
L’impact de la crise sur le secteur
Incontestablement, les manufacturiers sont durement frappés par cette crise. Rappelons-nous qu’une bonne partie d’entre eux ont dû fermer leurs portes le temps de mettre l’économie sur pause. Quoique nécessaire, cette pause a engendré des pertes qui seront difficile à récupérer.
En effet, alors que le secteur allait connaître une progression constante de sa croissance, la crise de la COVID-19 est venue mettre un coup d’arrêt à ces perspectives positives. Si on se fie aux prévisions de Statistique Canada ci-dessous, on anticipe qu’un retour à la situation pré-COVID pourrait prendre près de 2 ans.
La sécurité des employés avant tout
Dans ce contexte économique et sanitaire fragile, la priorité de tous les employeurs du secteur manufacturier est la sécurité de ses travailleurs essentiels. Ceux qui s’affairent tous les jours à faire en sorte que les tablettes puissent se remplir dans les épiceries, dans les pharmacies ou dans les magasins à grande surface. Pour que les Québécois puissent toujours acheter des denrées alimentaires, et oui, du papier de toilette!
Au quotidien, les entreprises sont en contact avec le gouvernement et la santé publique. Travaillant sans relâche, elles ont rapidement mis en place des mesures serrées pour maximiser la sécurité des travailleurs tout en maintenant un niveau de productivité le plus optimal possible, compte tenu de la situation. Les équipes ont été réduites au maximum, les travailleurs à risque restent à la maison, les mesures d’hygiène sont accrues, la communication avec les employés est constante et les encouragements nombreux.
Malgré les répercussions importantes de la crise pour les entreprises manufacturières, elles ont fait preuve de résilience, se sont réinventées pour certaines, et ont clairement démontré leur capacité et leur volonté à contribuer à la relance économique du Québec. Il faudra seulement un petit coup de pouce additionnel pour leur permettre de jouer pleinement leur rôle pour la vitalité de l’économie québécoise.
Dynamiser l’économie grâce au secteur manufacturier – cinq recommandations
Tout d’abord, nos entreprises manufacturières sont tournées vers l’avenir et ont sur la table des projets d’investissement. Nous pouvons spécifiquement penser aux projets visant l’automatisation et la robotisation de leurs activités.
Alors que certains de nos membres ont vécu une diminution de 20 % à 50 % de leur carnet de commandes, ces projets ont, à terme, le potentiel d’accroître leur productivité, un aspect d’autant plus pertinent qu’il contribuera pleinement à la relance économique. Cela dit, pour les réaliser, ils ont besoin d’un soutien direct de la part du gouvernement. Alors, par où commencer? Il faut leur offrir de l’aide directe, soit des subventions, pour réaliser ces projets. Les entreprises bénéficieraient d’un souffle supplémentaire pour être en meilleure posture pour la phase de relance, voire même en être l’élément déclencheur et sa courroie de transmission. Les entreprises manufacturières doivent se relever dès maintenant et ne peuvent pas s’endetter davantage.
Dans un deuxième temps, nos grands manufacturiers investissent beaucoup en recherche et développement (R-D). Afin de conserver les innovations au Québec et ainsi d’assurer le maintien des emplois des chercheurs québécois et le développement de technologies ici, il serait souhaitable de revoir à la hausse les taux des crédits d’impôts à la R-D. La relance sera l’occasion pour les grands manufacturiers de revoir leurs opérations à l’échelle mondiale. La hausse des taux serait un facteur de rétention, mais également d’attraction pour de futurs investissements en R-D.
Troisièmement, il est primordial que le gouvernement facilite le paiement aux entreprises lorsqu’elles obtiennent des contrats publics de construction, ainsi qu’aux sous-traitants qui y sont associés, permettant ainsi aux entreprises d’avoir des liquidités supplémentaires. Nous demandons donc de devancer le paiement de la retenue, de payer les matériaux avant leur installation, ainsi qu’un paiement dans des délais raisonnables. Sur ce point, nos membres constatent actuellement des délais de paiement importants, allant jusqu’à 100 jours. Cette situation problématique est d’ailleurs exacerbée par la situation économique actuelle.
Quatrièmement, nous invitons le gouvernement à poursuivre sa réflexion quant à la révision de la règle du plus bas soumissionnaire conforme, afin d’inclure des paramètres favorisant les produits des entreprises établies au Québec. À l’heure actuelle, certains de nos membres constatent une forte compétitivité avec les entreprises américaines, ainsi que des manœuvres de dumping économique qui auront un effet négatif sur notre capacité de relance. Ainsi, le Québec doit déployer les mesures appropriées pour soutenir les entreprises établies ici et les emplois qu’elles génèrent. En ce sens, le secteur municipal devrait être inclus dans cette réflexion pour un maximum d’efficacité.
Enfin, nous sommes préoccupés quant à l’alourdissement du fardeau administratif et règlementaire auquel les entreprises devront faire face dans la période de relance économique, notamment en matière d’autorisations. Dans les circonstances, il serait tout à fait inopportun d’ajouter des exigences supplémentaires qui auraient des impacts financiers ou administratifs négatifs sur leurs activités. Ce faisant, nous demandons au gouvernement d’attendre que la relance économique soit bien avancée avant de publier de nouveaux règlements qui auraient pour effet de créer de nouvelles exigences et donc, de reporter la phase de relance.
Véritable force tranquille, le secteur manufacturier québécois a joué un rôle névralgique durant la crise et continue de le faire au quotidien. Malgré de durs coups et contrecoups, les manufacturiers ont été inventifs et résilients, prouvant encore une fois l’importance du secteur pour l’économie d’ici. Devant les perspectives que nous connaissons, il est aujourd’hui nécessaire de lui donner le coup de pouce qui fera la différence et lui permettra de se battre à armes égales sur son terrain de jeu, comme à l’international, face à ses concurrents du monde entier.
Par Véronique Proulx
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