Reconnaissons-le, en ce qui a trait à la gestion des matières résiduelles, le Québec a fait des efforts depuis les années 80. Mais nous ne sommes pas tout à fait devenus ce que nous croyons être, c’est-à-dire des «pros» du bac vert.
Même si le recyclage fait davantage partie de notre train-train quotidien, les derniers rapports de Statistique Canada et de Recyc-Québec démontrent qu’en matière de réduction des déchets, nous sommes bien loin des objectifs fixés par les gouvernements et les municipalités depuis les années 90. Pire encore, le Québec mérite le titre de grand champion canadien de déchets résidentiels avec une production de 466 kg par habitant par année, bien loin devant l’Alberta, la Colombie-Britannique et l’Ontario.
En vérité, recycler n’est désormais plus suffisant. Pour diminuer le poids de nos déchets, il faut maintenant composter!
De plus en plus populaire, le compostage est une nouvelle mesure de tri des déchets. Mais n’y a-t-il rien de plus repoussant à l’idée de conserver chez soi, dans la cuisine, sur le balcon ou dans la cour, nos propres déchets résiduels? Le compostage, est-ce seulement pour les «purs et durs»?
S’il est un mythe à déconstruire, c’est bien celui de l’odeur du compost, car un compost bien équilibré ne dégage pas d’odeurs nauséabondes comme on a tendance à l’imaginer. L’idée de cette chronique n’est pas de vous expliquer comment composter, car une visite sur le Web suffira, mais plutôt de voir comment l’industrie québécoise peut y contribuer.
L’objectif de réduire nos déchets fait suite à une longue démarche citoyenne et gouvernementale car des ordures, au Québec, ce n’est pas ce qui manque! Voici les faits. Entre 1994 et 2004, la quantité de production de matières résiduelles est passée de 7 millions à 14 millions de tonnes, soit une augmentation de 62% et ce, malgré la politique de gestion intégrée des déchets solides, adoptée par le gouvernement Bourassa en 1989.
Durant cette même période, la quantité de détritus envoyés au dépotoir n’a pas diminué, elle a augmenté, passant de 5 millions à 6,4 millions de tonnes. Nous constatons donc que le plan d’action de gestion des matières résiduelles du gouvernement du Québec, de 1998 à 2008, n’a pas porté fruit.
Devant cette constante augmentation des matières résiduelles, le recyclage ne suffit pas. C’est pour cette raison qu’une tendance se dessine à l’horizon pour un compostage intégré dans le tri de nos déchets. Puisque le taux de récupération des matières organiques s’élève seulement à 6% au Québec, il y a beaucoup de travail à faire et l’innovation dans ce domaine représente un potentiel énorme.
Comment se fait-il que devant l’engouement vert de la plupart des secteurs de l’économie et face aux nombreuses possibilités de développement, l’industrie québécoise ne se soit pas lancée dans la fabrication de bacs de compostage? Peu connu du grand public, l’équipement simple et efficace pour pratiquer cette mesure de sauvegarde de l’environnement demeure encore cher: 225-250$ pour le Blue Planet Smart.
Fabriquée au Québec chez Rototek Plastic, une entreprise de rotomoulage, avec des matériaux recyclés, cette énorme boule représente le premier geste de l’industrie pour le développement du compostage domestique. Devant cette vague verte qui fait surfer le Québec actuellement, quel industriel se lancera dans la confection d’un bac de compostage le rendant aussi populaire que le bac vert?
Mais en raison de la complexité chimique du compostage, le gage de réussite se retrouve dans la simplicité du geste. Il faut faciliter le compostage.
Il est grand temps de permettre à des ménages en manque de temps d’agir pour l’environnement.
Et puisque le défi que représente le compostage résidentiel est de taille, pourquoi ne pas viser également le développement d’outils pour une collecte municipale des déchets organiques. Envisager l’idée d’un compostage industriel est-il si utopique?
Devra-t-on attendre que le gouvernement impose une taxe à la pesée de nos déchets pour que les moyens de réduction des déchets apparaissent? Car c’est en recyclant et en compostant davantage que nous pourrons réduire le poids de notre sac de poubelles. Pour vous laisser sur une image plus rigolote, pensez donc à Ti-Mé de La Petite Vie qui aurait trouvé bien complexe la gestion de ses poubelles en 2008!
Marie-Élaine Lambert Professeur de géographie au Cégep Marie-Victorin