L’automatisation est sur toutes les lèvres, y compris celles du premier ministre Legault qui déclarait il y quelques mois : « Il y a des PME qui vont avoir deux choix. Soit qu’ils investissent dans des robots ou de la numérisation pour augmenter leur productivité, ou ils vont disparaître. ». De quoi soulever interrogations et craintes chez les entrepreneurs. La FCEI propose de démystifier les aprioris gravitant autour de ce sujet stratégique d’avenir.
L’énoncé du premier ministre soulève des inquiétudes, et c’est assez compréhensible. Il sonne alarmiste et ne semble pas laisser le choix aux PME : si elles ne prennent pas le virage de l’automatisation, elles seraient destinées à fermer boutique.
Mais, concrètement, qu’est-ce que l’automatisation ? L’automatisation correspond à l’utilisation de technologies pour effectuer certaines tâches avec une intervention humaine réduite. « Il y a souvent des mésinterprétations entourant l’automatisation. L’imaginaire collectif pense tout de suite aux robots, alors qu’il y a plusieurs types d’automatisation et que cela couvre une large gamme de domaines, allant de la production à la gestion des clients et au-delà. On oublie bien souvent que les usages de l’automatisation les plus courants renvoient aux processus comptables, à la gestion des paies et des stocks, ainsi qu’au traitement des ventes. », informe François Vincent, vice-président pour le Québec à la FCEI.
Les amalgames autour de l’automatisation peuvent fausser les perceptions des entrepreneurs qui, pour certains, se sentent bien loin de ces réalités induites. En effet, d’après les données de la FCEI, même si le Québec affiche une avance par rapport à la moyenne nationale (41 % contre 37 %) en ce qui concerne les PME ayant entamé un processus d’automatisation au sein de leur entreprise, il reste que de trop nombreux entrepreneurs ne s’estiment pas concernés. Au Québec, 54 % des dirigeants de PME pensent que l’automatisation ne convient pas à leur modèle d’affaires, contre 59 % pour l’ensemble du Canada.
La FCEI a analysé l’adoption de l’automatisation en fonction de la taille des entreprises, et une tendance intéressante s’est révélée : plus l’entreprise est petite, moins elle considère l’automatisation compatible avec son modèle d’affaires. En revanche, plus elle est grande, plus elle y a recours. En effet, 62 % des PME comptant de 0 à 4 employés estiment que l’automatisation n’est pas alignée avec leur modèle d’entreprise. Ce chiffre diminue à mesure que le nombre d’employés augmente, descendant jusqu’à 19 % pour les PME de plus grande taille (50 à 499 employés). « Encore ici, il faut être très clair : toutes les entreprises de tous les secteurs économiques peuvent s’automatiser. », rappelle François Vincent.
Alchad Alegbeh, analyste à la recherche à la FCEI, souhaite rassurer les chefs de PME : « L’automatisation n’est pas là pour voler les emplois aux humains. Elle sert surtout à effectuer les tâches qui n’ont pas de valeur ajoutée, ce qui fait gagner du temps ».
Une récente étude de la FCEI révèle que les trois premières motivations des PME pour investir en automatisation sont d’accroître la productivité (66 %), d’assurer un gain de temps pour que les employés se concentrent sur l’essentiel (56 %) et d’atténuer les pénuries de main-d’œuvre (45 %). « Nos données montrent que l’automatisation libère du temps, facilite les démarches et améliore le rendement de l’entreprise, puisque 7 PME sur 10 estiment qu’elle est synonyme de gain de productivité. De plus, en septembre 2021, une étude de la FCEI a montré que l’automatisation constituait une option prometteuse, car pour 33 % des PME qui l’utilisent, elles donnent un taux de réussite de 81 %. Les faits sont parlants et prometteurs », ajoute Alchad Alegbeh.
L’étude de la FCEI confirme que les manques d’employés représentent un accélérateur pour inciter les PME à investir en automatisation. « Il existe une corrélation directe entre les secteurs les plus durement touchés par cet enjeu et le virage vers l’automatisation, nous apprend l’analyste à la recherche. Deux exceptions se démarquent : les secteurs de la construction, ainsi que de l’hébergement et de la restauration ». Selon la FCEI, il serait nécessaire de mener des offensives particulières pour ces secteurs et d’accorder une attention particulière à l’environnement fiscal et réglementaire.
Si opter pour l’automatisation est prometteur pour les entreprises, il reste que malheureusement, son coût et son investissement trop élevés rebutent nombreux dirigeants de PME (47 %). En effet, les PME québécoises semblent déjà être assaillies par de nombreuses hausses de coûts : charges salariales, coûts d’assurance, coûts des carburants et de l’énergie et coûts d’emprunt. Le vice-président de la FCEI signale que « cette pression supplémentaire se fait ressentir sur les investissements pour l’année 2023 qui sont en baisse dans toutes les catégories. Ceci n’est aucunement positif pour les investissements privés nécessaire pour prendre le virage de l’automatisation ».
Selon François Vincent, le calcul est simple : « Les petites entreprises ont besoin d’une marge de manœuvre pour effectuer des investissements en automatisation, mais elles sont ralenties par une lourde fiscalité. Notre étude montre également que 53 % des PME québécoises investiraient dans le développement de leur entreprise (innovation, augmentation de la production, etc.) et 30 % investiraient directement en automatisation en cas d’économies générées par une baisse du fardeau fiscal ».
Toujours selon lui, le gouvernement doit s’attaquer à la fiscalité : « Il faut reconnaître que toute dépense ou tout investissement est d’autant plus significatif pour une entreprise de petite taille. Cet effet de grandeur se constate également dans les impacts de la pénurie de main-d’œuvre. Plus l’entreprise est petite, plus le poids relatif d’un manque d’employé sur la productivité se fera sentir sur l’ensemble. Les conséquences auront également un effet multiplicateur. On l’observe dans le fardeau administratif et réglementaire, qui est inversement proportionnel à la grandeur de l’entreprise. Ainsi, les PME québécoises doivent naviguer avec un taux de taxes sur la masse salariale 30 % plus élevé que la moyenne canadienne et les plus petites entreprises des secteurs de la construction et des services n’ont même pas accès au taux d’impôt réduit pour des petites entreprises. Les contraintes sont plus lourdes ».
La FCEI a soumis six recommandations sur le sujet au gouvernement du Québec. Celles-ci ont pour but de stimuler le processus d’automatisation au sein des PME québécoises, allant de la vulgarisation, à la communication et l’appui de l’état, mais également à la création d’un environnement fiscal plus favorable pour les petites entreprises. « C’est primordial d’accompagner les dirigeants de PME quand il s’agit d’automatisation. Il faut faire de la pédagogie sur le sujet pour dissiper les malentendus et les craintes. Il est urgent de mettre en place des actions pour améliorer le virage vers l’automatisation. Il en va du dynamisme économique, car le cœur de nos régions administratives bat au rythme de la petite entreprise. », conclut François Vincent.
La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante continuera de s’intéresser au sujet de l’automatisation afin de bien outiller et d’accompagner les PME dans ce virage. Pour plus d’information sur ce dossier ou sur les autres actions de la FCEI, veuillez consulter le site web de l’organisation : https://www.cfib-fcei.ca/fr/pourquoi-devenir-membre-fcei
Par Maud Larivière, FCEI.
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