Par Eric Bérard
Vos affaires vont bien et vous voulez agrandir votre usine, tout en profitant de l’occasion pour en automatiser plusieurs aspects. Ou encore vous voulez faire l’acquisition d’un concurrent pour assurer votre croissance. Tout ça demande des sous et, bien sûr, chaque institution financière vous dit qu’elle est la meilleure pour assurer le montage financier de votre projet.
Qui croire ? Où sont les meilleurs taux d’intérêt et conditions de crédit ? Est-ce que des subventions ou autres formes d’aide financière pourraient venir alléger la facture ?
C’est le genre de questions auxquelles répondent chaque jour des spécialistes en financement d’entreprises, comme le cabinet de services-conseils KPMG qui a accepté de déléguer deux de ses experts pour répondre aux questions du Magazine MCI en la matière.
C’est justement parce qu’il est neutre dans le choix des stratégies à adopter qu’un conseiller d’une maison sérieuse peut vous aider à faire les meilleurs choix en matière de financement.
« Notre principal élément de valeur ajoutée dans les contextes de financement, c’est notre indépendance. C’est pour ça que nos conseils sont sollicités, c’est justement pour avoir un avis objectif sur la solution de financement la plus avantageuse », explique Benoit Lemay-Thibault, directeur principal du financement corporatif chez KPMG.
Son collègue Éric Thibault, associé, fiscalité et pratique d’aide gouvernementale, insiste quant à lui pour que tout projet ait des assises solides, qu’il soit bien défini pour aller chercher les capitaux qui sont disponibles auprès de différentes sources, chacune ayant souvent des critères bien précis.
« On va échanger avec le client, comprendre davantage son portefeuille de projets, identifier aussi ses besoins. Des fois ça peut être simplement des besoins d’aller chercher des subventions ou des crédits d’impôt. Dans d’autres cas, il a aussi besoin de financement. Quand on a fait ce débroussaillage-là avec lui, à ce moment-là on est capables d’identifier pour lui un plan de match pour minimiser son coût de projet via les aides gouvernementales », dit-il
M. Lemay-Thibault ajoute que les gouvernements, tant fédéral que provincial, aiment bien le secteur manufacturier parce qu’il est porteur de retombées économiques et qu’il peut contribuer à rehausser la productivité de l’économie, notamment par des projets d’automatisation.
« Généralement, les gouvernements vont vouloir aider les entreprises qui ont des projets, des projets porteurs soit pour l’exportation, pour l’augmentation de la productivité, pour la qualification de la main-d’œuvre, pour ajouter de nouvelles lignes d’affaires ou agrandir leurs installations », opine M. Thibault.
Ces aides gouvernementales peuvent prendre la forme de crédits d’impôt (à l’innovation, à la recherche et développement, à l’efficacité énergétique, etc.), de subventions ou encore de prêts pardonnables.
Mais l’écosystème des programmes gouvernementaux est vaste, et change rapidement. Nos invités mettent en garde les industriels de ne pas trop se fier aux conversations tenues sur les terrains de golf ou lors d’autres rencontres avec des pairs qui vantent les mérites d’un programme gouvernemental donné.
Au moment où votre projet prend forme, le programme auquel votre connaissance fait référence n’existe peut-être déjà plus, certains critères ont peut-être été modifiés et votre entreprise n’y est plus admissible, ou peut-être qu’un autre programme qui convient mieux à votre projet est né depuis.
De là, une fois de plus, l’importance de bien définir votre projet. Si on parle d’agrandissement d’usine, dans quelle région du Québec ? On en profite pour améliorer l’efficacité énergétique du bâtiment ? La machinerie sera renouvelée au passage ? Chacun de ces éléments – et plusieurs autres – peuvent jouer en votre faveur pour l’obtention d’aide gouvernementale.
Parce que les gouvernements offrent leur aide façon très ciblée. Eux aussi ont été frappés par les forts taux d’intérêt pour financer leur dette. Ils sont prêts à avancer des sous, mais encore faut-il les convaincre du rendement sur investissement de chaque dollar de fonds publics injecté.
Ça représente de nombreux formulaires à remplir, les bonnes cases qu’il faut cocher dans les documents gouvernementaux, un art qu’on développe à force d’en faire.
Mais les entrepreneurs n’ont pas toujours le temps de se prêter à ces exercices fastidieux. Ils ont une usine à faire rouler, du personnel à embaucher, voir à la production, aux ventes. De là l’intérêt de faire appel à des consultants externes.
Le commissariat industriel de votre MRC ou des comptables en qui vous avez confiance pourraient vous référer à des professionnels des programmes gouvernementaux.
« Les gouvernements veulent arriver avec des propositions financières qui vont compléter ce que les entreprises peuvent aller chercher avec leurs institutions financières conventionnelles », résume Éric Thibault.
Parce que oui, le gros du financement proviendra plus souvent qu’autrement d’une institution financière traditionnelle. Selon nos experts, la banque ou la caisse avec laquelle une entreprise manufacturière fait déjà affaire est souvent la meilleure porte où aller cogner en premier.
« Effectivement, la banque existante est toujours une partenaire privilégiée. C’est des partenaires de longue date, qui ont des relations établies. C’est souvent le point de départ de l’analyse de comment financer un projet », nous dit Benoit Lemay-Thibault.
Et même si on aime bien casser du sucre sur le dos des banques qui réalisent des profits faramineux, les experts de KPMG soulignent qu’elles s’humanisent de plus en plus, accordant une attention croissante aux volets ESG (Environnement, Société, Gouvernance) des projets qu’elles financent.
Si le projet que vous désirez financer comporte des aspects ESG, mettez-les de l’avant. Votre institution financière pourrait bonifier son offre.
« Pour avoir discuté avec certaines institutions financières, la plupart essaient de développer ou de donner une certaine valeur au fait que des immeubles ou d’autres équipements sont de meilleure efficacité énergétique », témoigne M. Thibault.
« Dans certains cas, les banques doivent avoir dans leur portefeuille des entreprises qui sont de plus en plus ESG. On voit que les banques transitionnent tranquillement vers ça parce que c’est le marché qui le demande », constate l’expert.
L’aspect environnemental et de la machinerie moderne qui consomme moins d’électricité, ce ne sont pas que des vœux pieux. Ce sont de plus en plus des critères à considérer alors que les industries se disputent les rares blocs d’énergie disponibles dans un contexte de rareté d’électricité.
Démonter qu’on ait la volonté et la capacité de faire plus avec moins, en détaillant précisément comment on a l’intention de s’y prendre, peut ouvrir plusieurs portes donnant accès à des capitaux.