Pourtant, plus que jamais, la chasse au pétrole est ouverte. Québécois et Québécoises se tiraillent à savoir s’il vaut mieux pour le Québec viser l’indépendance en matière d’énergie fossile, en exploitant celle qu’il pourrait contenir dans son sol, ou maintenir cette dépendance au pétrole en continuant de l’importer, cela pour ne pas accroître notre contribution aux gaz à effet de serre (GES).
Or, il est paradoxal de parler d’indépendance au pétrole, étant donné qu’il ne s’agit pas d’une ressource renouvelable. Aussitôt les réserves épuisées, nous serons revenus à la case départ, soit celle de devoir importer notre carburant des pays étrangers. Il serait plus sensé d’attendre le jour où nous serons totalement affranchis du pétrole pour parler de véritable indépendance.
D’emblée, l’argument de prédilection de ceux et celles en faveur d’une indépendance québécoise au pétrole n’est pas inintéressant : étant donné que nous consommerons du pétrole et produirons de toute manière les GES qui en découlent, aussi bien en tirer, collectivement, des bénéfices.
Toutefois, je doute qu’il s’agisse de l’avenue la plus efficace, puisque nous pouvons de moins en moins profiter du luxe de pouvoir remettre à plus tard le passage aux énergies renouvelables. La gravité de l’état de dégradation de l’environnement et l’inertie des dirigeants font en sorte que le changement permettant d’éviter le pire devra être radical.
En revanche, une nouvelle branche de la science semble être porteuse de ce changement radical espéré : il s’agit du biomimétisme.
En effet, le biomimétisme est une nouvelle façon de faire en matière d’innovation technique. Elle imite en fait les mécanismes les plus astucieux des animaux et organismes vivants. La portée de cette science est énorme : imaginez un monde dans lequel des façades extérieures s’autonettoient sans l’aide de détergent, juste en imitant la forme des feuilles de lotus.
Imaginez un monde dans lequel les hélices de bateaux ne dégradent pas les berges, à l’instar du mouvement de nageoire des poissons. Bref, cette approche a le potentiel de littéralement permettre une refonte de tout ce qui nous entoure et, en ce sens, est peut-être le germe d’une révolution à venir.
Le biomimétisme est un très bel exemple de conciliation entre les intérêts économiques et le respect de l’environnement, car les avantages profitent aux deux sphères : gain d’efficacité, développement durable, diminution des coûts de matériaux, économies d’énergie, etc.
Pour prendre un exemple concret de l’impact prometteur de cette science, il a été estimé qu’en créant des petites bosses sur une aile d’avion, imitant les tubercules des baleines à la surface de leurs ailerons, l’efficacité de l’aile augmenterait d’environ trente-deux pour cent. Il va sans dire qu’un tel détail technique peut faire réaliser de grandes économies de carburant.
Mais l’aspect le plus génial du biomimétisme est certainement celui de l’évolution qu’il entraîne dans notre rapport à la nature. Renversant l’idée de l’homme « comme maître et possesseur de la nature » au prix d’écosystèmes aujourd’hui dévastés, le biomimétisme part plutôt de l’idée selon laquelle la nature a quelque chose à apprendre à l’homme, car celle-ci regorge de stratégies en durabilité qu’elle applique depuis des millénaires !
Emmanuelle Gauthier-Lamer Étudiante à la maîtrise en philosophie Université de Montréal