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L’Abitibi-Témiscamingue: une région minière ?

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Le premier obstacle qui se dresse devant la région est la raréfaction des ressources. La montée du prix de l’or au cours des deux dernières années a incité plusieurs sociétés minières à réactiver des projets qui avaient été mis de côté, faute de teneurs suffisantes pour en assurer la rentabilité. Or, peu de gisements d’importance ont été découverts au cours des dernières années.

«En cinq ans, il s’est dépensé 2,5 milliards $ en exploration au Québec. Malgré tout, ces investissements ont permis de découvrir seulement deux gisements majeurs, soit les projets aurifères Éléonore de Goldcorp à la Baie-James et Canadian Malartic d’Osisko à Malartic. Et encore, on ne peut parler de réelles découvertes. Les deux compagnies ont simplement su relire des documents connus et les modéliser avec succès», fait observer Jean-Pierre Thomassin, directeur général de l’Association de l’exploration minière du Québec (AEMQ).

La faille de 23 milliards $

Il n’en demeure pas moins que le sous-sol de l’Abitibi-Témiscamingue demeure riche. Plus de 20 millions d’onces d’or ont été identifiées ou estimées par les différentes compagnies minières et sociétés d’exploration établies entre Louvicourt et la frontière ontarienne. Au prix actuel de l’or, qui oscille aux alentours de 1150 $ l’once, cela représente une valeur de 23 milliards $.

D’autres sociétés ont plutôt opté pour les métaux de base et les métaux spécialisés. C’est ce qui a permis à Royal Nickel d’amorcer un projet de nickel à Launay et à Canada Lithium d’envisager de remettre en production un ancien gisement de lithium à La Corne. Les ressources de ces deux projets totalisent 4,3 milliards de livres de nickel et 1,2 milliard de livres de lithium. Si elles voient le jour, la durée de vie des deux mines seraient respectivement de 21 et 30 ans.

Les deux solitudes

Dans au moins sept cas, les sociétés responsables du développement de ces projets envisagent un mode d’exploitation à ciel ouvert. Et c’est là que le bât blesse. Il faut dire qu’en 100 ans d’histoire, l’Abitibi-Témiscamingue n’a connu sur son territoire que très peu de mines de ce type.

La perspective de voir les fosses se multiplier dans le paysage a provoqué une levée de boucliers chez plusieurs citoyens, à un point tel que la Conférence régionale des élus a senti le besoin d’organiser un forum où tous pourraient discuter de l’avenir du développement minier. Cette activité, une première pour la région et même pour le Québec, s’est déroulée les 19 et 20 mars. Malgré le fait qu’elle ait réussi à rapprocher l’industrie, les citoyens et les écologistes, peu de consensus ont réussi à en émerger.

Deux semaines plus tard, ce fut au tour de la Société Radio-Canada d’organiser un débat à Rouyn-Noranda portant sur le développement minier. Celui-ci a été diffusé le 11 avril. À nouveau, difficile de concilier les deux points de vue. La région est-elle donc condamnée à un éternel tiraillement entre développement économique et protection de l’environnement?

Un développement durable malgré tout

«Les sociétés minières font du développement durable, même si c’est à partir d’une ressource non renouvelable. Les profits qu’elles réalisent sert en partie à découvrir de nouvelles mines, donc à maintenir des emplois, autant directs qu’indirects. C’est un impact positif durable qu’il ne faut pas négliger», soutient pour sa part le député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, Daniel Bernard.

Selon l’ingénieur géologue de formation, le questionnement doit surtout viser la pérennité de l’industrie minière. À cet effet, Mines Aurizon semble avoir frappé le bon filon. Même si elle envisage de creuser à McWatters une fosse située à la fois près d’un secteur habité, d’une aire protégée, d’un parc national et d’un esker d’eau potable, son projet est plutôt bien accueilli par la communauté.

C’est que la société minière a choisi de consulter la population avant même de savoir si elle irait de l’avant. Du printemps à l’automne 2009, pas moins de 35 groupes différents ont ainsi été rencontrés. L’exercice a permis de dégager cinq grands enjeux dont Aurizon devra tenir compte dans son étude de faisabilité.

«Il ne faut pas voir cela comme une dépense, mais comme un investissement, fait valoir le vice-président d’Aurizon, Martin Bergeron. En étant mieux informée et impliquée, la population comprend mieux les enjeux et accepte mieux le projet. Nous avons même reçu des idées intéressantes auxquelles nous n’aurions pas songé.»

Nul ne peut prédire si les démarches d’Aurizon déboucheront sur un nouveau modèle qui saura assurer le développement à long terme de l’industrie minière.

La société pourrait néanmoins avoir créé un précédent. Ses efforts lui ont d’ailleurs valu un prix décerné par l’AEMQ. Reste à voir si ses pairs lui emboîteront le pas.

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