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La nouvelle réalité de nos PME manufacturières québécoises

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La crise de la COVID-19 entraine des conséquences importantes pour les PME manufacturières québécoises. Elles doivent faire face à plusieurs enjeux tels que la baisse de commandes, les problèmes de liquidités, la gestion des mises à pied et des rappels et la réorganisation des opérations. Personne ne pouvait prédire l’ampleur des conséquences de cette crise sanitaire sur les entreprises et il est parfaitement normal que de nombreuses situations n’aient pas été optimales, voire critiques. Le but de cet article n’est pas de dire aux dirigeants d’entreprises ce qu’ils auraient dû faire, mais plutôt de leur donner des outils pour maintenir leur compétitivité en temps de crise et des pistes de solutions pour être mieux armés face à un autre événement de ce type.

La santé des employés

Au cours des derniers mois, les entreprises ont dû mettre en place des mesures pour protéger la santé de leurs employés, comme le réaménagement des postes et des horaires pour préserver la distanciation sociale et l’établissement de procédures de nettoyage des espaces de travail. Pour s’y retrouver dans toutes ces mesures, les entreprises peuvent consulter des ressources telles que la trousse COVID-19 de la CNESST ou encore le guide des meilleures pratiques d’opérations manufacturières en temps de COVID, réalisé par le Réseau de la transformation métallique du Québec (RTMQ), en collaboration avec STIQ et Perform.

M. Joseph Laflamme, président de Vestshell, une entreprise de Montréal qui fabrique des pièces coulées en acier, a mis en place les mesures suivantes dans son usine : ajout de lavabos pour le lavage des mains, marquage visuel des 2 mètres de distanciation à respecter dans la cafétéria, affichage des consignes d’hygiène partout dans l’usine, rappels fréquents des consignes et mise à disposition du désinfectant pour les mains. Il a également procédé à une analyse des risques qui a permis l’ajout de barrières (plexiglas) et le port obligatoire de masques.

Une variation de la demande

Les secteurs et marchés industriels ont subi différemment les impacts de la pandémie. Si certains d’entre eux, comme le médical, ont connu une hausse de la demande, d’autres comme le transport collectif, ont connu une baisse. Pour les entreprises qui œuvrent dans les marchés en baisse de demandes, cette situation aura un impact direct sur leur profitabilité, leur performance opérationnelle et leur capacité à absorber les coûts fixes. De plus, dans ces marchés, une pression sur les prix pourrait être constatée à cause du surplus de capacité disponible. Face à cette situation, les entreprises devront travailler sur deux fronts : les gains de productivité et le développement des affaires.

Revoir sa planification stratégique

Il est important de bien comprendre la situation de l’entreprise et de ses partenaires d’affaires. L’équipe de direction, incluant un responsable de chaque processus, doit d’abord dresser un portrait actuel et juste de l’entreprise, au niveau des ventes, des approvisionnements, des ressources humaines, des ressources financières et de la capacité de production, afin d’établir les objectifs prioritaires. Pour se faire, le modèle de type SWOT ou FFOM (forces – faiblesses – opportunités – menaces) est vivement recommandé.

Une révision de la planification stratégique pourrait être nécessaire, afin de répondre plus adéquatement au nouveau portrait de la situation. De plus, il faudrait qu’elle soit évolutive parce que le contexte est incertain et changeant. La direction doit alors s’assurer de communiquer clairement à son équipe, par un plan de communication formel, les nouveaux objectifs de l’entreprise, la contribution attendue de chacune des fonctions, ainsi que les changements de cap, notamment au niveau des investissements prévus avant la crise. Les responsables de chaque fonction devraient s’assurer de mettre en place une structure de suivi dans leur département, surtout pour les équipes plus importantes.

En parallèle à cette réflexion stratégique, un plan financier devrait être préparé avec différents scénarios ainsi que des prévisions d’encaisse. Enfin, il faut aussi revoir le développement des affaires et les ventes. Il est possible que l’entreprise doive chercher de nouveaux clients plus activement (une fois que les clients actuels seront consolidés).

Poste de commandement (war room)

Afin de résoudre les nouveaux types de problèmes qui résulteront de la « nouvelle réalité », les entreprises auraient intérêt à instaurer un poste de commandement, formé d’une équipe multidisciplinaire et doté d’un canal de communication direct avec le comité de direction.

Dans un premier temps, l’entreprise doit désigner un facilitateur qui coordonnera le tout et s’assurera de la contribution de chacun des intervenants. Ce responsable peut être le gestionnaire principal, mais il est recommandé de confier ce mandat à une tierce personne, qui pourrait générer de nouvelles idées. Un patron pourrait limiter les conversations et l’apport d’informations utiles. Son rôle devrait plutôt être de prendre des décisions au moment opportun.

Le poste de commandement doit suivre 4 types d’information : les objectifs généraux et financiers, les plans d’action, la veille informationnelle et la résolution de problème (la créativité). Ce comité peut se réunir sur une base hebdomadaire, pour mettre à jour les priorités et les plans d’action. À mesure que la situation se stabilisera, les rencontres pourront s’espacer.

Planification des opérations

L’entreprise aurait intérêt à effectuer une planification de ses opérations, afin d’analyser sa capacité à remplir ses contrats en cours, en désignant d’abord les produits et les clients prioritaires. En cas d’impossibilité à livrer une commande, en raison par exemple d’un manque de matières premières, les priorités devront être revues, de même que les impacts sur l’ensemble des opérations (achats, en-cours de production, etc.).

Il est important, à ce point, d’ajuster les commandes dans le système et de « nettoyer » celles qui ne sont plus valides ou encore de modifier les dates de livraison et les quantités requises. Il peut être pertinent de contacter tous les clients pour vérifier leur statut, renouveler la collaboration (lien d’affaires), comprendre l’impact sur les commandes dans l’immédiat, mais aussi anticiper l’avenir, même si incertain. De la même façon, l’entreprise pourrait contacter tous ses fournisseurs pour voir lesquels sont fiables et lesquels sont à risque (prévoir alors une 2e source) et si les délais de livraison ont changé.

Au niveau de la remise en marche des équipements, l’entreprise devrait mettre en place un calendrier de maintenance et de vérifications et prévoir une date de disponibilité en production pour chacun d’eux. Tous les équipements devraient être vérifiés, tant en termes de fonctionnement que de sécurité.

Enfin, il est primordial que l’entreprise révise ses capacités informatiques pour répondre aux nouveaux besoins, tels que le télétravail pour certains employés et un parc informatique plus performant. Aussi, il ne faut pas négliger la cybersécurité. Une formation des employés pour les mesures de sécurité informatique dans le cadre du télétravail pourrait être nécessaire.

La créativité des PME

Dans cet environnement incertain, les PME devront être encore plus créatives et innovantes, et trouver de nouvelles façons de faire, voire se réinventer. Plusieurs entreprises québécoises, membres de STIQ, ont réorganisé une partie de leurs opérations pour créer de nouveaux produits essentiels en temps de crise. À titre d’exemple, l’entreprise Flexpipe a adapté sa fabrication pour développer un concept de vitres protectrices (sneezeguards) afin de sécuriser les contacts avec les clients ou encore pour permettre aux employés du domaine manufacturier de poursuivre leurs activités en toute sécurité. Autre exemple, les entreprises CMP solutions mécaniques avancées et Électroniques Promark ont travaillé ensemble pour développer « The Social Distancer », un appareil technologique prêt-à-porter sophistiqué qui aide les employés à maintenir une distance sécuritaire au travail, en calculant en continu la distance entre ceux-ci.

D’ailleurs, l’établissement de partenariats entre entreprises est une avenue intéressante pour ces dernières, qui pourrait leur permettre de faire plus avec des moyens réduits. Selon notre étude, le Baromètre industriel québécois, cette stratégie apporte des bénéfices tangibles pour la grande majorité des entreprises qui y ont recours.

Certaines entreprises devront se tourner vers de nouveaux types de clients. La volonté gouvernementale d’accélérer les projets d’infrastructure et d’encourager l’approvisionnement local, tout en respectant nos accords commerciaux, offrira de nouvelles avenues à de nombreuses entreprises.

Quelques pistes de solutions pour l’avenir

  • Penser à la sécurité des employés et à limiter les contacts entre eux.
  • Conserver les guides officiels en situation de pandémie.
  • Préparer un plan de contingence et de continuité.
  • Avoir de bonnes pratiques financières, en provisionnant une trésorerie pour ce genre d’événement – les entreprises qui ont un matelas financier sont mieux à même de profiter d’un ralentissement pour se réinventer ou mettre en place des changements positifs.
  • Renforcer sa chaîne d’approvisionnement (bonne relation avec ses fournisseurs actuels et connaissance des sources alternatives).
  • Avoir de la flexibilité sur le plancher de production.
  • Encourager le télétravail pour les postes où ça s’applique, mais aussi pour les employés dans l’usine, par exemple en organisant des rencontres par vidéoconférences entre employés.
  • Investir en innovation et en technologies numériques pour faire plus avec moins d’employés.
  • Établir des partenariats avec d’autres entreprises.

En terminant, le contexte de la pandémie a ralenti le secteur manufacturier, et ce, partout dans le monde. Face aux nouveaux défis qui attendent nos PME manufacturières, il ne fait aucun doute que ces dernières sauront faire preuve d’imagination et de résilience, comme elles l’ont démontré par le passé. Parions qu’elles en sortiront encore plus fortes et que nos chaines d’approvisionnement locales seront plus solides que jamais.

Par STIQ

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