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Jan

La batterie au lithium peut donner au Québec un positionnement mondial enviable

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L’industrie de l’électrification axée sur la batterie au lithium pourrait devenir un des plus grands vecteurs de l’économie du Québec dans les prochaines années. Le gouvernement de François Legault, entre autres, a d’ailleurs laissé envisager sa ferme intention de faire de la filière de batteries lithium-ion une stratégie de développement afin de contrecarrer les contrecoups de la pandémie de COVID-19 et de préparer la transition énergétique à laquelle le Québec doit faire face au cours de la prochaine décennie.

La volonté d’exploiter davantage la batterie au lithium n’est pas née de la dernière pluie. Déjà, à l’automne 2019, une étude de la firme KPMG soutenait que le Québec possédait d’innombrables atouts lui permettant du coup de se positionner dans la filière mondiale des batteries lithium-ion. Il peut notamment s’appuyer sur la présence sur son territoire de ressources minérales diversifiées.

Propulsée par la croissance exponentielle du marché des véhicules électriques, l’étude révélait la vitesse phénoménale à laquelle se transforme l’industrie de batteries lithium-ion à l’échelle mondiale. Cette popularité grandissante envers les véhicules électriques, notamment au Québec, entraînerait une hausse de la demande pour les batteries lithium-ion et pour les matériaux bruts nécessaires à leur fabrication, faisant ainsi de ce secteur un marché fort prometteur.

L’analyse de KPMG, réalisée pour le compte de Propulsion Québec, évaluait aussi que le nombre de véhicules électriques vendus en 2030 à travers le monde serait de 17 à 26 fois plus important qu’aujourd’hui. Quant à la demande, en tenant compte de l’ensemble des usines existantes et projetées, les besoins mondiaux seraient supérieurs à la production mondiale de batteries, jusqu’à trois fois la capacité de production, d’après la fourchette des prévisions. Le Québec profiterait très certainement de cette tendance.

Le Québec mondialement enviable

L’étude avançait également que le Québec dispose de plusieurs avantages comparatifs lui permettant d’ambitionner à occuper une place au sein de la chaîne d’approvisionnement mondiale. Notons notamment qu’une proximité relative à des constructeurs automobiles et à des matières premières essentielles à la fabrication des batteries, et l’accès à une source d’énergie propre et abondante ainsi que des coûts d’exploitation peu élevés dans un contexte nord-américain sont d’autres avantages qui s’ajoutent à la présence d’un bassin d’entreprises.

« L’électrification des véhicules routiers aurait un effet bœuf, mentionne Benoit Boulet, professeur de génie électrique et vice-doyen à la recherche et à l’innovation à la Faculté de génie de l’Université McGill. Si tous les véhicules étaient électriques, les émissions de CO2 diminueraient de 27 % au Canada et d’environ 43 % au Québec. »

« Face à la frénésie mondiale autour de la filière, la fenêtre d’opportunité pour agir et nous positionner est relativement courte. Nos décideurs doivent envoyer un message fort en faveur du développement de ce créneau stratégique et accroître notre indépendance énergétique dans le secteur de l’électrification des transports. Notre étude avait pour objectif d’offrir de solides pistes de réflexion aux décideurs et à d’éventuels investisseurs, en prenant soin de démontrer les forces du Québec et de recommander, du coup, des actions concrètes », souligne pour sa part Sarah Houde, présidente-directrice générale de Propulsion Québec, la grappe des transports électriques et intelligents.

Précisons également qu’aujourd’hui, la quasi-totalité de la production de cellules pour les batteries lithium-ion se situe en Asie, soit en Chine, au Japon et en Corée du Sud. Moins de 3 % des batteries étaient produites en dehors de ces trois pays.

Avec des centres de recherche de pointe sur l’électrification des transports et la présence sur son territoire de minéraux stratégiques tels que le lithium et le graphite, le Québec est aujourd’hui bien positionné pour participer au développement et à la production de la prochaine génération de batteries lithium-ion.

C’est d’ailleurs dans ce contexte que MM. Iya Touré et Amyot Choquette, respectivement vice-président et directeur principal, à Ressources Québec, ont participé à une mission en Asie du 7 octobre au 11 octobre 2019, organisée par le Ministère de Ressources naturelles du Canada et Affaires mondiales Canada.

Des investissements de 7 milliards

L’étude de McKinsey, commandée par Investissement Québec (IQ), qui a fait l’objet d’une fuite dans les médias au début du mois de septembre dernier, révélerait entre autres que le gouvernement du Québec mènerait cette parade afin de justifier un investissement de plusieurs centaines de millions de dollars de fonds publics d’ici 5 à 10 ans dans sa filière électrique.

Encore récemment, le quotidien Le Devoir rapportait entre autres que le projet consistant à développer une filière du lithium au Québec nécessiterait des investissements de près de 7 milliards, selon des propos rapportés du ministre de l’Économie, M. Pierre Fitzgibbon : « Nous avons engagé McKinsey pour nous aider, on a un plan très clair. Cela va coûter 7 milliards. Le gouvernement du Québec, je pense, doit mettre là-dedans une couple de milliards. C’est un projet qui va être tellement structurant pour le Québec. (…) Mais tout seuls, on ne peut pas faire cela. Cela nous prend de l’expertise. »

En amont de la chaîne se trouvent les ressources naturelles. Le Canada et le Québec, entre autres, possèdent un sol riche en matières premières nécessaires à la fabrication d’une cellule de batterie (le nickel, le lithium, le cobalt, le manganèse et le graphite) et les extraient pour ensuite les exporter.

La production minière représente ainsi 47 G$ en 2018 au Canada et emploie plus de 634 000 personnes (emplois directs et indirects). Le Québec concentre plus de 21 % de l’activité minière du pays (une production minière valorisée à près de 10 G$ en 2018).

Un défi : le recyclage

Ainsi, de plus en plus omniprésentes dans nos vies, les batteries lithium-ion propulsent les voitures électriques, appelées à se populariser sur les routes. Or, jusqu’à récemment, il n’existait très peu ou aucune solution pour recycler les batteries en fin de vie. Recyclage Lithion, une entreprise de Montréal, a alors développé un procédé innovant pour lequel elle a reçu une aide financière de 4,8 M$ du gouvernement du Québec en décembre 2019.

Son projet Lion permet de développer une technologie ayant pour objectif le recyclage de batteries lithium-ion. Cette démonstration consiste à mettre à l’essai une technologie permettant de recycler de manière sécuritaire tous les types de batteries lithium-ion, indépendamment de leur chimie et de leur grosseur, et de récupérer les matériaux de valeur avec un haut niveau de pureté.

Le procédé a été conçu de façon à diminuer les émissions et les résidus et à maximiser la qualité des matériaux récupérés pour obtenir la technologie économiquement rentable, efficace et gagnante sur le plan environnemental. La technologie vise du coup à récupérer des matériaux pouvant ensuite être retournés à l’industrie afin de produire de nouvelles batteries.

L’usine pilote aura à terme une capacité annuelle de 200 tonnes de batteries lithium-ion, soit l’équivalent de 300 à 650 batteries de voitures électriques.

Par ailleurs, Investissement Québec a aussi fait savoir récemment qu’elle a des projets de développement verts en ligne de mire. Le président, Guy LeBlanc, a entre autres dit, au lancement des comités de développement régional pour la relance post-COVID, le 18 septembre dernier, espérer faire grimper la part de l’environnement dans les subventions que l’organisme accorde. Les chiffres avancés lors de ce lancement font état que près du quart des projets du ministère dirigé par M. Fitzgibbon et d’IQ sont « alimentés par la filière environnementale ».

De la parole aux actes

Rappelons que le gouvernement du Québec, en partenariat avec Orion Mine Finance et le Groupe Pallinghurst, a confirmé en août dernier que l’offre soumise par les partenaires visant l’achat des actifs de la société minière Nemaska Lithium a été acceptée par cette dernière.

Une contribution gouvernementale majeure, et versée par l’entremise d’Investissement Québec, pourrait atteindre 95 M$ sous forme d’équité d’une société par actions. Cette acquisition vise la relance des activités de l’entreprise tout en maintenant le siège social et le centre décisionnel au Québec.

Cette transaction marque du coup un jalon important dans le développement de la filière industrielle québécoise de production de batteries de véhicules électriques.

« Le projet de Nemaska Lithium est un projet stratégique pour le Québec et contribuera à la relance économique. L’achat des actifs de Nemaska Lithium permettra ainsi d’assurer une relance pérenne des activités de l’entreprise et de soutenir la filière québécoise de batteries de véhicules électriques. Cette annonce rappelle l’engagement du gouvernement à soutenir la croissance de l’industrie minière et à conserver ici l’expertise dans le domaine fortement prometteur des technologies liées à l’électrification des transports », avait dit Pierre Fitzgibbon lors de l’annonce, le 24 août dernier.

Le gouvernement québécois a donc tout intérêt à dynamiser la filière, mettre en place un cadre réglementaire favorable et mondialement enviable dans le but d’accompagner ces industriels. Se faisant, cela leur permettrait de montrer notre savoir-faire au monde entier et de monter en puissance notre capacité de production dans le but de continuer à gagner des parts de marché international.

Par Alexandre Lampron

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