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Feb

Investissement dans la C Series. Le juste prix à payer pour sauvegarder les emplois ?

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Chez Aéro Montréal, qui chapeaute tout le secteur aéronautique au Québec, la décision est très justifiée : l’aéronautique ne peut se comparer à d’autres secteurs comme l’agroalimentaire.

« Le secteur aéronautique crée beaucoup de richesse. Et les gouvernements n’hésitent pas à investir en sachant que les emplois manufacturiers sont très bien rémunérés. Si nous voulons vendre des avions plus performants et plus respectueux de l’environnement, il faut poursuivre nos investissements. Dans quelle direction ? Dans les technologies qui permettront à nos aéronefs d’être plus écologiques », explique Suzanne Benoit, présidente-directrice générale d’Aéro Montréal.

Québec avait-il le choix ?

Non, croit Véronique Proulx, directrice aux Communications, Affaires publiques et Stratégies chez Manufacturiers et exportateurs du Québec (MEQ).

« Bombardier représente 2 % du PIB québécois. C’est énorme. Je ne pense pas que le gouvernement avait le choix. On devait aider cette entreprise. C’est l’un des seuls grands fleurons québécois que nous avons encore. Il faut s’assurer de le soutenir. »

Véronique Proulx ajoute que le partenariat de Québec n’est pas une forme d’injustice pour les autres secteurs. À son avis, le gouvernement doit investir dans les secteurs avec un fort potentiel de développement. Et quels sont-ils ?

« Ceux qui ont la volonté et l’ambition de se développer et d’innover, qui ont la capacité d’aller de l’avant avec de bons produits. »

MEQ admet que plus d’un milliard de dollars, c’est beaucoup d’argent. Mais l’organisme croit que c’était nécessaire pour poursuivre le projet.

« Il ne faut pas perdre de vue que Bombardier est en concurrence avec de gros joueurs soutenus par leur gouvernement. En aéronautique, les coûts de développement sont très élevés. C’est ce qui justifie le besoin d’un si gros investissement. »

Écosystème complet

Au fil des ans, la grande région de Montréal a créé un écosystème complet dans le secteur aéronautique. Et ces conditions gagnantes sont le fruit d’un siècle de travail acharné, selon Aéro Montréal.

« Québec n’avait guère le choix d’investir. Il faut protéger notre écosystème parce que la concurrence est forte dans les autres pays. Nous devons demeurer en avant du défilé. Plus nous allons investir en innovation, plus nous serons concurrentiels », indique Suzanne Benoit.

Pour elle, consacrer 1 G$ dans Bombardier, c’est très peu. Pourquoi ? En raison de l’avenir prometteur de la C Series dans un contexte où l’économie verte prend de plus en plus d’espace.

La gamme C Series 100 et 300 offre un avantage de 15 % sur le plan des décaissements d’exploitation et de plus de 20 % sur le plan de la consommation de carburant. Les meilleures performances sur piste avec une autonomie transcontinentale sont assurées. En matière de consommation de carburant, de charge utile, de distance franchissable et de performance au décollage, c’est l’avion de l’avenir, dit Bombardier.

L’aluminium-lithium figure parmi les nouveaux matériaux utilisés dans la fabrication de l’appareil. Cet alliage est à la fois plus léger et résistant que l’aluminium traditionnellement utilisé.

« C’est l’avion le plus avancé d’un point de vue technologique au monde dans sa catégorie. Au cours de prochaines années, les règlementations sur les gaz à effet de serre seront plus exigeantes. Les avions devront être plus écologiques et plusieurs ne pourront plus voler. La C Series deviendra alors un modèle à suivre. »

Bien que l’agroalimentaire soit le plus important secteur d’activité au Québec, Suzanne Benoit ne croit pas qu’il crée autant de richesse que celui de l’aéronautique. « Une nation qui a un secteur aéronautique est une nation développée. C’est un leader. »

De son côté, Véronique Proulx de MEQ souligne que l’organisme défend les intérêts tout autant de l’un comme de l’autre.

« Nous faisons régulièrement des représentations auprès de Québec pour que tous les secteurs reçoivent leur juste part. Les entreprises qui innovent, qui ont besoin de main-d’œuvre qualifiée et d’exporter sont considérées. Dans le cas de Bombardier, c’est une entreprise innovante. Elle fait beaucoup de recherche et de développement et c’est la raison pour laquelle nous croyons que le gouvernement a bien fait de les soutenir. »

Retombées économiques

À ce jour, 243 ventes fermes de la C Series ont été conclues avec divers clients. Quelque 600 autres sont conditionnelles. Bombardier prévoit atteindre le seuil de rentabilité d’ici 2021.

« Le programme de certification étant complété, les ventes devraient décoller dès cette année, ce qui va entraîner d’autres acheteurs potentiels », ajoute Suzanne Benoit.

Au bout du compte, 1 700 emplois sont protégés à Mirabel. Si tout va pour le mieux, cela devrait générer un total de 12 500 emplois directs et indirects au Canada en période de pointe, la plupart au Québec.

« Il y a plusieurs fournisseurs potentiels et actuels de la C Series qui ont intérêt à ce que le projet se développe. La décision de Québec est juste et visionnaire », soutient Véronique Proulx.

Bombardier s’est aussi tourné vers Ottawa pour un appui au développement de la C Series. Au moment de mettre sous presse, le nouveau gouvernement libéral de Justin Trudeau n’avait toujours pas arrêté sa décision sur l’aide qu’il entend apporter. Selon les plus récentes informations, Ottawa devrait dévoiler sa décision en mars prochain.

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