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De 1896, date de la découverte des premières pépites, jusqu’à 1999, des dizaines de milliers de prospecteurs vont converger vers le Nord-Ouest canadien pour y faire fortune.Plus d’un siècle plus tard, c’est le Nord du Québec qui devient en quelque sorte la terre promise.

Le gouvernement Charest fonde de grands espoirs dans son Plan nord, un programme de développement concentré au nord du 49e parallèle, comme moteur de développement économique. Tout autant, sinon plus, que ne le faisaient à l’époque les Libéraux de Robert Bourassa avec le projet hydroélectrique de la Baie-James.

Déjà, des entreprises des secteurs miniers et métallurgiques implantées au Québec, ont annoncé des projets d’investissement majeurs. C’est le cas notamment d’Arcelor Mines Canada, QIT et Cliffs Natural Resources avec la deuxième phase de son projet du Lac Bloom.

« Alors que nous ne comptions qu’une cinquantaine de projets en 2009-2010, nous recensons actuellement pas moins de 112 projets miniers au Québec, qui sont évidemment à différents stades du cycle minier », nous confirme d’entrée de jeu, Michel Bélanger, directeur général du Comité Sectoriel de la Main-d’œuvre du secteur minier au Québec (CSMO Mines). Mais avant d’analyser les différentes projections de l’industrie, faisons un bref retour dans le passé.

Historique

Il faut remonter aussi loin qu’en 1686 pour retracer les origines de l’industrie minière québécoise. Le Chevalier de Troyes, accompagné d’une centaine d’hommes dont les frères Le Moyne (Sieurs de Sainte-Hélène, d’Iberville et de Maricour), découvre alors en Abitibi-Témiscamingue un gisement de plomb, de zinc et d’argent, sur les rives du lac Témiscamingue. Ce gisement sombre toutefois dans l’oubli et ce n’est qu’au cours de la décennie 1890 qu’il sera pleinement exploité. Entre temps, on découvre des premières pépites d’or en Beauce en 1835.

Trente ans plus tard, on exploite la première mine de cuivre, la mine Eustis, près de Sherbrooke, alors qu’en 1967, un fermier du nom de Joseph Fecteau découvre l’amiante dans le canton de Thetford. Il faudra toutefois attendre une dizaine d’années pour découvrir un gisement d’amiante d’importance dans la région d’Asbestos et la mise en exploitation d’une première mine (mine Bell) à Thetford Mines. C’est le début de la grande saga de l’amiante. Fait intéressant : le Québec réagit promptement à cette évolution minière et proclame en 1880 l’Acte général des mines de Québec, qui attribue au gouvernement la propriété du sous-sol.

Le secteur observe un taux de renouvellement moyen de sa main-d’œuvre de l’ordre de 10%

La décennie 1920-1930 voit l’intérêt minier se déplacer vers le nord-ouest québécois. L‘Abitibi-Témiscamingue compte alors 90 % des titres miniers enregistrés au Québec. À cette époque, les compagnies exploitent le cuivre, l’or, le fer et l’amiante. Les décennies qui suivent voient certaines régions minières se développer. En plus de l’Abitibi, on trouve des gisements à Chibougamau, sur la Côte-Nord, au Labrador, dans la péninsule gaspésienne et en Estrie.

On assiste alors à une recrudescence de l’exploitation du fer sur la Côte-Nord, de l’or et du cuivre en Abitibi-Témiscamingue et de l’amiante en Estrie. De la fin des années 70 au début des années 2000, on passe de l’exploration à l’exploitation. La production s’amorce aux mines Thompson Bousquet, en 1978, et Doyon, en 1979, au nord de la municipalité de Cadillac, en Abitibi-Témiscamingue ainsi qu’aux gisements LaRonde (Dumagami) en 1988, et de Bousquet 2, en 1990.

Encore aujourd’hui, le camp minier de Bousquet-Cadillac demeure la principale région aurifère au Québec, avec les mines Doyon, Mouska et LaRonde. Étant donné que le sol québécois est riche en minéraux divers, il n’est pas étonnant qu’on ait aussi découvert des diamants à l’est de la Baie d’Ungava et près des monts Otish en 2000-2001.

Une industrie importante…

L’industrie minière est un levier important de développement économique au Québec. Ses mines, ses fonderies, ses affineries, ses compagnies de forage et d’exploration, ses centres de recherche, ses entrepreneurs et ses consultants génèrent plus de 50 000 emplois directs, en plus des retombées considérables dans les régions ainsi que dans les grands centres urbains. La valeur des expéditions de cette industrie s’élève annuellement à plus de 6,2 milliards de dollars. Le Québec est reconnu mondialement pour la diversité de sa production minière.

Le Québec produit une trentaine de substances minérales dont l’or, l’argent, le cuivre, le zinc, le nickel, le fer, le titane, l’amiante, le sel, le graphite, la silice, la chaux et le niobium.

Cycle minier

Une mine, qu’elle soit souterraine ou à ciel ouvert, représente un projet de grande envergure. Il n’est donc pas surprenant que ce projet prenne de dix à quinze ans avant de se concrétiser et qu’il soit jalonné de plusieurs décisions importantes. Dans les faits, l’exploitation d’une mine concrétise une série d’étapes qui se résument selon le cycle suivant:

L’exploration minérale consiste à identifier des sites où la présence de minéraux est exploitable. Les programmes de forage permettront d’extraire des échantillons et de les analyser pour établir le volume et la teneur du gisement. Une analyse de faisabilité technique, financière et environnementale complètera cette première étape du cycle minier.

L’aménagement et la construction d’une mine constituent la deuxième étape du cycle minier. Cette étape ne sera entreprise que si le gisement est suffisamment important (étude de coût, rentabilité économique) pour en justifier l’exploitation. L’aménagement d’une mine nécessite de concevoir le plan de la mine, de mener différentes consultations publiques sur le projet, d’évaluer les retombées financières et les impacts environnementaux, d’obtenir les permis d’implantation nécessaires et de réaliser une évaluation finale sur l’exploitation de la mine. Une fois ces étapes franchies, la construction de la mine et de ses installations peut être envisagée. L’aménagement d’une mine peut prendre de 5 à 10 ans, dont 2 à 4 ans pour la construction seulement.

Vient ensuite l’exploitation minière à proprement dit. Selon la teneur du gisement, elle peut durer quelques années ou s’étendre sur des décennies. Comme l’exploitation d’un gisement a une durée de vie limitée, il faut donc éventuellement fermer la mine et restaurer le site. Si la fermeture d’une mine est la dernière étape du cycle minier, les activités de restauration sont planifiées avant même son ouverture… et l’extraction de la première tonne de minerai.

Le Québec produit une trentaine de substances minérales.

Les choix environnementaux ne sont donc pas laissés au hasard. Les zones qui ont été transformées par l’exploitation doivent redevenir des écosystèmes. C’est ainsi que toute excavation est remplie, que tout amoncellement est nivelé, que les lieux sont reboisés et que les écosystèmes sont recréés. Dernière étape du cycle minier, la fermeture de la mine et la restauration du site peuvent durer jusqu’à une dizaine d’années.

En constante évolution

À l’instar des autres secteurs d’activités, l’industrie minière n’est pas à l’abri de la retraite éminente des premiers baby-boomers. L’industrie observe un taux de renouvellement moyen de sa main-d’œuvre de l’ordre de 10 %. « Certaines régions risquent d’être plus touchées que d’autres. C’est le cas notamment de la Côte-Nord, où 31 % des travailleurs ont plus de 50 ans. C’est donc dire que près du tiers des emplois sera à renouveler dans les prochaines années dans la région», confirme Michel Bélanger du CSMO.

À cette statistique s’ajoute une demande de main-d’œuvre pour des projets qui atteindront la phase d’exploitation d’ici 3 à 5 ans. D’après l’Association minière du Québec, ce sont des milliers d’emplois qui seront disponibles d’ici 5 ans pour de jeunes travailleurs spécialisés issus des écoles secondaires, des cégeps et des universités.

Pour extraire 10 000 tonnes de minerai par jour il en compte jusqu’à 50$/t.

Parmi les emplois les plus en demande, notons toutes les spécialisations en ingénierie et géologie, des postes en mécanique diverse, électricité et soudure, personnel de laboratoire, opérateur de machinerie et évidemment, mineurs et foreurs. Des postes ouverts tant aux femmes qu’aux hommes, autre preuve de l’évolution d’une industrie typiquement masculine.

Formation

Évidemment, les métiers en ingénierie et géologie nécessitent une formation universitaire. L’UQAT (Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue), l’UQAC (Chicoutimi), l’UQAM, l’Université McGill, l’École Polytechnique et l’Université Laval à Québec, dispensent ces formations. Au niveau technique et collégial, les Cégeps de Thetford et de l’Abitibi-Témiscamingue sont les principales institutions dotées de spécialisations minières. Finalement, au niveau de la formation professionnelle, plusieurs commissions scolaires offrent des programmes spécifiques à l’industrie.

Des entreprises offrent également des formations spécialisées adaptées au secteur minier. C’est le cas notamment de Praxair, fournisseur des gaz comprimés qui offre une formation en sécurité sur la bonne utilisation de cette matière hautement explosive, utilisée à divers moments du cycle minier.

« Souvent, la problématique vient d’un mauvais entreposage ou encore de l’utilisation de mauvais régulateurs.On dénote aussi l’absence de dispositif empêchant le retour du gaz dans certains cas. Par leur toxicité ou leur haute inflammabilité, les gaz peuvent être mortels. Nous les connaissons bien et nous travaillons à en rendre l’utilisation la plus sécuritaire possible », nous a fait savoir André Gervais, formateur professionnel chez Praxair.

Investissements majeurs

D’ici 2015, le Québec exploitera plus de 20G$ de minerais. Pour y parvenir, des investissements de l’ordre de 22G$ seront nécessaires en exploration, mise en valeur et exploitation, sur une douzaine de projets miniers actuellement annoncés (voir tableau).

Selon Ianik Marcil, économiste indépendant spécialisé dans le domaine des transformations économiques, industrielles et technologiques, l’impact de ces projets miniers sera toutefois limité car une proportion importante de la production sera exportée.

« Ces projets étaient planifiés depuis plusieurs années et n’émanent pas tous de l’engouement créé par le Plan Nord. Les entreprises ont simplement attendu le moment où le prix vendant (mondial) des matières premières serait favorable.Les autorités auront à faire face à plusieurs défis de taille comme l’intégration de l’industrie. Il faudra voir à ce que les entreprises de deuxième et troisième transformation se tournent vers les producteurs d’ici, et non vers l’étranger. D’autres inquiétudes surgissent notamment au niveau de la pénurie de main-d’œuvre qualifiée mais, encore plus important, voir à ce que les retombées générées par ces investissements profitent avant tout à l’économie québécoise », a-t-il tenu à préciser.

Les entreprises offrent des formations spécialisées adaptées au secteur minier.

Ces investissements majeurs et historiques auront des impacts sur l’emploi et l’activité économique, mais aussi sur les exportations. Ces milliards d’investissement permettront entre autres la création de plus de 10 000 emplois directs et feront en sorte d’accroître l’apport de l’industrie minière dans la filière métallique québécoise (mines, transformation des métaux, fabrication de produits métalliques, de machines et de matériel de transport).

En effet, alors que les investissements de la filière métallique en 2010 représentaient 58 % des investissements manufacturiers, les investissements cumulés en 2015 représenteraient près de 70 % de ceux-ci. Bien qu’elle ne représente que le tiers des emplois du secteur manufacturier, la filière métallique génère plus de la moitié des exportations des biens et crée donc le plus de richesse économique au Québec.

Impacts potentiels des projets miniers sur la filière métallique

Au cours de la prochaine décennie du moins, l’industrie constituera donc une véritable mine d’or tant au point de vue du développement économique que de l’emploi. C’est à nous que revient en tant que société d’explorer cette opportunité au maximum!

SAVIEZ-VOUS QUE:

  • En 2015, 31 mines auront atteint le stade de l’exploitation au Québec et 35, en 2020?
  • Les dépenses en exploration et mise en valeur ont atteint 450 M$ en 2010?
  • Pour extraire 10 000 tonnes de minerai par jour il en compte jusqu’à 50$/t?
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