Le ralentissement économique important causé par la pandémie a inévitablement mis un frein à de nombreux projets d’innovation, d’achats d’équipements industriels ou d’agrandissements des capacités de production. Devant une situation sans précédent, la plupart des entreprises sont passées en mode survie. Les institutions financières et les divers organismes gouvernementaux ont accru leurs efforts pour assurer cette survie. Mais déjà, alors que l’incertitude reste entière, on sent poindre un virage de la gestion de crise vers le mode relance.
Investissement Québec (IQ) n’a pas tardé à réagir lorsque la crise de la Covid est devenue réalité au Québec. Dans les jours qui ont suivi les premières annonces de confinement, et avec l’appui du gouvernement québécois qui mettait sur pied une série de mesures d’aide totalisant 2,5 milliards de dollars, IQ lançait le Programme d’action concertée temporaire pour les entreprises, le PACTE.
« On se devait d’avoir de l’empathie et de faire preuve de diligence le plus rapidement possible », nous dit Sylvie Pinsonnault, première vice-présidente, Stratégies et solutions d’affaires chez Investissement Québec. « Le programme a été mis sur pied rapidement pour venir en aide aux entreprises qui étaient prises de court, qui avaient des problèmes de liquidité. L’idée, c’était d’offrir des modalités de remboursement souples, avec des moratoires. C’est un prêt qui est offert aux entreprises pour leur amener du fonds de roulement, pour les aider à passer à travers la crise. Et c’est un programme qui se veut souple également au niveau de l’admissibilité. »
Un centre d’appel pour guider les entreprises vers les bonnes ressources, une Foire aux questions pour répondre rapidement aux inquiétudes, Investissement Québec s’est bien gardé de remplacer les autres organismes et les institutions financières, pour plutôt travailler en complémentarité. Au-delà de l’aide d’urgence et du moratoire de six mois sur les remboursements de capital, Sylvie Pinsonnault souligne que IQ a mis l’accent sur la garantie de prêt pour les nouvelles interventions financières.
« Le rôle d’Investissement Québec est important dans une situation comme ça, parce qu’il faut travailler main dans la main avec les institutions financières, au bénéfice des entreprises du Québec. C’est pour ça que la garantie de prêt est venue vraiment comme la solution idéale pour aller très rapidement, parce que les banques ont déjà une relation avec les entreprises. »
Questionnées sur les changements provoqués par la crise dans leurs critères d’octroi de financement, les institutions financières affirment que la pandémie n’a pas modifié ces critères. C’est le cas notamment chez Desjardins, nous dit Robert Bastien, vice-président Services aux entreprises.
« Ce qui change, ce ne sont pas les critères, c’est la situation des entreprises et de différents secteurs de l’économie qui sont affectés de près ou de loin par la Covid. C’est certain qu’on met un peu plus de rigueur à bien comprendre l’impact de la Covid et de la situation économique sur l’entreprise et le secteur. C’est sûr que ça vient affecter la rentabilité des entreprises, les performances futures, et il y a des secteurs qui peuvent être fortement affectés. Ces secteurs peuvent avoir accès à du financement de façon plus limitée ou plus difficile, à cause du fait qu’ils sont affectés au niveau de leur rentabilité, de leurs revenus. »
Difficile, mais pas impossible, précise Robert Bastien. La clé : bien comprendre l’impact de la Covid sur l’industrie dans laquelle on œuvre, sur nos clients, nos fournisseurs et notre chaîne d’approvisionnement, et bien analyser cette situation pour en comprendre les effets.
« Comprenez bien tout ce qui se passe avec votre écosystème, et assurez-vous que vous êtes en mesure de gérer les risques et les conséquences et d’assurer une pérennité à votre organisation. Pour les entreprises très touchées par la situation, c’est le temps d’être innovateur, imaginatif, et de voir quelles sont les opportunités qui peuvent se présenter dans le contexte actuel et comment faire un virage, ajuster le plan d’affaires de l’entreprise. »
Robert Bastien estime que les entreprises québécoises bénéficient d’un bon soutien des organismes gouvernementaux et des institutions financières pour surmonter la crise et qu’elles pourront retomber sur leurs pattes une fois la crise terminée.
Après la crise, la relance
Selon Sylvie Pinsonnault d’IQ, la crise de la Covid n’a pas eu que des impacts négatifs. La pandémie aurait aussi amené les institutions financières et les organismes gouvernementaux à resserrer les rangs derrière les entreprises pour les soutenir.
« Ce qu’on a senti, c’est le souhait d’être tous à l’œuvre pour la relance, pour aider les entreprises. Beaucoup ont travaillé d’arrache-pied, et ça continue. Parce qu’il faut vraiment penser à la relance des entreprises, à augmenter leur productivité. »
Avec la récente intégration du Centre de recherche industrielle du Québec (CRIQ), d’Export Québec et des bureaux régionaux du MEI, Investissement Québec bénéficie de nouveaux leviers pour appuyer les entreprises, bien au-delà des questions de financement.
« Avec le nouvel IQ, on est passé d’un partenaire financier à un partenaire qui offre des solutions pour accélérer la croissance des entreprises. La solution peut être financière, mais elle peut aussi être dans l’accompagnement technologique avec notre nouveau levier qui est le CRIQ, ou dans l’accompagnement au niveau de l’exportation. L’accompagnement est la clé. Si on veut maximiser les chances de succès et avoir une belle relance, il faut travailler sur les deux fronts : avoir les liquidités pour la réalisation des projets, mais aussi bien accompagner nos entreprises. »
Desjardins compte aussi participer à la relance de l’après-Covid. Tout en reconnaissant un haut degré d’incertitude pour les mois à venir, Robert Bastien souligne qu’il faut déjà voir plus loin que les prochains trimestres.
« Le secteur manufacturier au Québec, c’est un secteur important pour Desjardins. Nous voulons nous positionner comme le principal partenaire financier de l’industrie manufacturière au Québec, et nous allons assurément aider les entreprises qui ont des projets d’investissement, qui veulent se porter acquéreur d’équipements industriels et qui veulent investir pour passer à travers la Covid, mais aussi survivre dans l’après-Covid. »
Innovation, numérisation, nouvelles technologies, autant de mots clés qui vont faire partie du vocabulaire de ceux qui soutiennent le secteur manufacturier au Québec, pour la relance de l’économie.
Une primeur : Manufacturiers Innovants 2.0
Dans le cadre de notre entrevue avec Sylvie Pinsonnault d’Investissement Québec, cette dernière nous a fait part d’une primeur : l’élargissement du programme Manufacturiers Innovants. Jusqu’à maintenant réservé aux entreprises manufacturières, le programme s’adressera en effet à une clientèle plus large.
« L’initiative Manufacturiers innovants, c’était pour les manufacturiers. Mais on se rend compte que dans le cadre de la relance, si on veut vraiment faire bouger l’aiguille de la productivité et de l’innovation, il faut aller un peu plus large, dans des secteurs qui viennent alimenter le manufacturier. Nous allons élargir les secteurs admissibles, pour aider le plus possible d’entreprises qui gravitent autour du secteur manufacturier. Il y a vraiment plein d’entreprises, par exemple dans la logistique, qui offrent des services qui gravitent autour du manufacturier et qui deviennent un élément essentiel au moteur. »
Les détails du nouveau programme Manufacturiers Innovants devraient être dévoilés cet automne. Il constituera aussi un bon test pour l’arrimage de l’ensemble des nouveaux volets d’Investissement Québec.
Par Claude Boucher