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Nov

Entrevue avec le ministre François-Philippe Champagne

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Innovation, Sciences et Industrie

Lorsqu’on pense industrie, on se tourne plus souvent qu’autrement vers Québec pour les politiques et le soutien aux entreprises. Mais Ottawa y a également son rôle à jouer. Le Magazine MCI souhaitait faire le point sur les actions et les visées du gouvernement fédéral en matière d’économie et d’industrie. Nous avons donc posé quelques questions au ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne.

MCI : Vous occupez le poste de ministre de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie depuis janvier 2021. Avec un peu plus d’un an et demi en poste, quel bilan faites-vous de votre rôle à la tête de ce ministère?

F-PC : Nous avons fait plusieurs investissements stratégiques pour stimuler la croissance par l’innovation et la transition vers une économie plus verte, que ce soit dans le secteur de l’automobile, dans le secteur de l’aérospatiale ou encore en travaillant en étroite collaboration avec différentes grandes industries comme l’acier et l’aluminium. Par ailleurs, notre gouvernement continue de soutenir les entreprises et d’investir dans la transformation numérique et dans des technologies de pointe. Ainsi, nos entreprises deviennent plus innovantes, ce qui se traduit par une plus grande productivité et compétitivité. Ces investissements sont essentiels pour stimuler la croissance à long terme et créer des emplois bien rémunérés.

MCI : L’économie et l’industrie sont deux domaines où Québec et Ottawa se partagent la juridiction. Comment voyez-vous le rôle d’Ottawa sur le plan de l’industrie?

F-PC : Les gouvernements du Canada et du Québec ont de nombreuses priorités en commun en matière d’appui à l’innovation, aux technologies propres, à la biofabrication, aux minéraux critiques, et plus encore. Nous travaillons en collaboration avec le gouvernement du Québec sur plusieurs dossiers.

Le Canada possède tous les atouts pour garantir la prospérité économique. Notre main-d’œuvre est l’une des plus instruites au monde, et nous disposons d’établissements de recherche de calibre mondial et de sources abondantes d’énergie propre. Notre rôle est de favoriser les investissements et de collaborer avec les industries et les entreprises en leur offrant des outils dont elles ont besoin pour innover, croître, créer de l’emploi et être concurrentielles au sein d’une économie mondiale en évolution.

Cela inclut des mesures pour lutter contre les changements climatiques, y compris pour atteindre plus rapidement la carboneutralité. C’est dans cette optique que le Canada met en place un écosystème de production de batteries pour inciter le secteur des transports à réduire ses émissions.

Le gouvernement continue également de soutenir les grands projets de recherche-développement menés dans les secteurs traditionnellement robustes du Canada, comme ceux de l’automobile, de l’aérospatiale, des ressources naturelles et de l’agroalimentaire. Des programmes soutiennent déjà ces secteurs, y compris le Fonds stratégique pour l’innovation et les grappes d’innovation mondiales.

MCI : Quelles sont les principales grappes industrielles qu’Ottawa entend appuyer au cours des prochaines années?

F-PC : Notre gouvernement se concentre sur une transformation économique et industrielle à long terme nécessaire à la transition vers un avenir à faibles émissions en carbone tout en assurant que les Canadiens ont accès à de bons emplois. La numérisation accrue de l’économie canadienne et l’évolution des industries vers un avenir carboneutre soutiendront ces objectifs, et sont, à ce titre, d’importantes priorités économiques pour le Canada.

Pour concrétiser ces priorités, le gouvernement met l’accent sur la décarbonisation industrielle grâce à des outils comme l’Accélérateur net zéro du Fonds stratégique pour l’innovation, pour favoriser les investissements à grande échelle qui stimulent la transition industrielle et les mesures qui permettent d’effectuer de fortes réductions d’émissions de gaz à effet de serre.

De plus, nous accordons la priorité à l’adoption accrue des technologies numériques et propres par l’intermédiaire de programmes et d’outils stratégiques afin de stimuler la croissance de tous les secteurs de l’économie. Par exemple, les investissements réalisés dans la production de batteries et les chaînes d’approvisionnement connexes positionneront les secteurs canadiens des technologies de pointe, comme celui de l’automobile, pour bâtir un avenir durable.

MCI : Outre l’industrie, votre ministère s’occupe aussi des sciences et de l’innovation. Et vous avez été par le passé vice-président d’une importante entreprise haute-technologie, ABB. C’est un domaine que vous connaissez donc bien. Comment voyez-vous la position du Canada et du Québec sur la scène internationale du côté de l’innovation?

F-PC : Les secteurs canadiens de la science et de la recherche sont bien placés pour répondre aux exigences des grands défis de notre époque grâce à une main-d’œuvre hautement instruite, des établissements de recherche de calibre mondial et des sources abondantes d’énergie propre.

Depuis 2016, notre gouvernement a investi plus de 14 milliards de dollars en ressources additionnelles pour soutenir la science et la recherche, le plus important montant jamais investi par un gouvernement canadien. De plus, nous avons annoncé notre intention lors du plus récent budget d’établir une agence canadienne d’innovation et d’investissement, qui collaborera de façon proactive avec les entreprises pour les aider à prendre les décisions d’investissement nécessaires pour innover, croître et être plus concurrentielles.

MCI : Quels sont les principaux outils fédéraux à la disposition des chefs d’entreprises industrielles?

F-PC : Le Canada dispose de toute une gamme de programmes et de services pour soutenir les innovateurs à toutes les étapes de leur parcours de croissance et pour permettre aux petites et moyennes entreprises d’avoir accès à des conseils d’experts et à du soutien. Les programmes et services suivants en sont de bons exemples :

  • Le Service de croissance accélérée offre aux entreprises déjà établies des conseils d’experts et du soutien pour propulser leur croissance.
  • Le Carrefour de la croissance propre aide les innovateurs du milieu des technologies propres à trouver les soutiens dont ils ont besoin à l’échelle du gouvernement.
  • ExplorePI sert de marché de la propriété intellectuelle et permet de trouver des possibilités d’octroi de licences et de collaboration avec les titulaires de brevets du secteur public.
  • PerLE est un outil libre-service qui aide les entreprises à trouver rapidement les permis et licences dont elles ont besoin.
  • Le Programme canadien d’adoption du numérique aide les entreprises à prendre le virage numérique, à propulser leurs activités de commerce électronique ou à numériser leurs activités commerciales.
  • Solutions innovatrices Canada aide les innovateurs qui veulent accéder au marché en finançant des projets de R-D et de mise à l’essai de prototypes dans des conditions réelles.

Nous soutenons également de manière ciblée les investissements qui visent à promouvoir la création d’emplois, la R-D et d’autres activités présentant un intérêt pour les Canadiens. Cela se fait, entre autres, par l’entremise de programmes comme le Fonds stratégique pour l’innovation, le Programme d’aide à la recherche industrielle et d’autres initiatives à venir, comme la mise sur pied d’une agence canadienne d’innovation et d’investissement.

En outre, nous offrons des programmes fructueux qui ciblent des industries précises, comme l’automobile, l’aérospatiale, le tourisme, l’agriculture, les arts et la culture, et plus encore. Des programmes adaptés aux besoins des régions sont aussi mis de l’avant par les agences de développement régional, comme Développement économique Canada pour les régions du Québec.

MCI : Alors que nous sommes encore en sortie de crise de la Covid-19, quels sont les défis auxquels votre ministère s’attaque présentement?

F-PC : Les principaux défis à l’échelle nationale sont la pénurie de main-d’œuvre et la hausse du coût de la vie. Soulignons aussi les pressions accrues sur les chaînes d’approvisionnement.

L’inflation est à son plus haut niveau en 40 ans, les échanges commerciaux sont perturbés et la guerre en Ukraine se poursuit. On constate aussi des signes préoccupants sur le marché du travail, avec l’augmentation du nombre de postes vacants dans de nombreux secteurs.

Devant ces défis, notre gouvernement continuera de soutenir fermement l’économie afin de placer le pays en bonne position pour prospérer. Nous continuerons également à soutenir les entreprises, à investir dans la transformation écologique et numérique et à appuyer la mise au point d’innovations pour instaurer une économie résiliente, inclusive et faible en carbone.

Ces mesures permettront au gouvernement de jeter les bases nécessaires à la croissance à long terme et à la création d’emplois bien rémunérés, ce qui est le meilleur moyen de rendre la vie plus abordable pour les Canadiens.

MCI : Au Québec, il y a tout un débat autour des seuils d’immigration, un débat qui n’a pas cours à Ottawa. Alors que nous faisons face à une pénurie inédite de main-d’œuvre, quel rôle doit jouer selon vous l’immigration pour résoudre cette crise?

F-PC : La disponibilité de la main-d’œuvre est un facteur important pour la reprise économique et la croissance du Canada. Tous les secteurs de l’économie et toutes les régions du pays sont touchés par l’accès limité au capital humain. Les entreprises m’ont confirmé que cet enjeu était leur priorité absolue, et de loin.

L’accueil d’immigrants et de travailleurs qualifiés a considérablement atténué les perturbations causées par la pandémie. L’immigration aide les employeurs à avoir accès à des travailleurs qualifiés. Ainsi, l’immigration appuie le mandat d’ISDE, qui est de créer les conditions favorables pour que les entreprises puissent croître, innover et prendre de l’expansion. L’immigration favorise aussi l’accès aux talents mondiaux et aide à combler les lacunes régionales et sectorielles en matière de talents.

Par Claude Boucher

Entrevue parue dans l’édition d’Octobre/Novembre du Magazine MCI.

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