Par Eric Bérard
L’entreprise Plastiques Gagnon, dont le siège social se trouve à Saint-Jean-Port-Joli, estime avoir investi 35 millions $ dans son expansion et sa modernisation au cours des trois dernières années.
Le gouvernement du Québec croit en l’entreprise et lui a accordé le mois dernier 9,8 millions $ en prêts afin de contribuer à son essor.
« Le défi de la productivité au Québec, on va le relever grâce à la mobilisation des entreprises d’ici qui misent sur l’intégration de technologies novatrices. L’équipe de Plastiques Gagnon l’a bien compris, et notre gouvernement est fier de la soutenir dans ses démarches », a alors déclaré Pierre Fitzgibbon, ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie.
En entrevue au Magazine MCI, le directeur général de Plastiques Gagnon, Philippe Pelletier, explique que l’entreprise mène de front plusieurs projets.
En plus d’une cure de rajeunissement à l’usine principale de Sain-Jean-Port-Joli, l’entreprise a fait l’acquisition d’un entrepôt, à quelques minutes à peine de là. On y place diverses composantes et fournitures utilisées moins souvent.
« On manquait de place sur le site principal », dit M. Pelletier au sujet de l’usine de St-Jean-Port-Joli, qui a fait l’objet de quatre agrandissements successifs.
Nouvelle usine à Lévis
Le projet majeur est cependant l’usine toute neuve de 35 000 pieds carrés à Lévis. Celle-ci est conçue de manière à pouvoir doubler sa superficie au fil de l’expansion de ses activités.
L’espace ne manque pas puisque le terrain où elle sera située fait 165 000 pieds carrés.
Plastiques Gagnon était déjà en activité à Lévis depuis 2021, lorsqu’elle a fait l’acquisition d’une autre entreprise similaire, Quéplast Injection.
L’ensemble locatif industriel et le site n’a éventuellement plus suffi à la demande.
« Puisqu’on a grossi avec eux au cours des deux dernières années, cet emplacement-là ne convient plus. C’est là qu’on a pris la décision de bâtir une nouvelle usine à Lévis », précise le porte-parole de Plastiques Gagnon.
Automatisation et industrie automobile
Le fabricant en sous-traitance de pièces de plastique dessert des secteurs aussi variés que l’automobile, la défense ou le médical, et mise également sur l’automatisation.
Son usine de Saint-Jean-Port-Joli compte près d’une dizaine de robots.
« C’est automatisé le plus possible pour réduire notre dépendance à la main-d’œuvre et, du même coup, réduire les risques de santé et sécurité associés à nos tâches de travail », explique M. Pelletier.
« On n’a pas un environnement de travail très dangereux, mais quand on peut travailler avec des robots ça simplifie la vie de nos opérateurs quand même », dit-il.
La flexibilité est de mise puisque, selon les clients, ils peuvent fabriquer des volumes relativement petits de pièces diverses – une centaine d’unités par an – à plusieurs milliers.
« On fabrique les produits de nos clients, en fonction de leurs devis à eux », indique le directeur général.
Les produits de l’entreprise se retrouvent un peu partout au Canada, au Mexique et en Finlande.
Dans la région des Grands Lacs se trouvent certains gros clients du secteur automobile, pour qui ils fabriquent divers items, par exemple des recouvrements de compartiments à plein d’essence ou encore des boîtiers de fusibles.
L’entreprise québécoise ne vend pas encore directement ses produits aux grands fabricants de voitures, mais elle y travaille.
« On n’est pas directs encore avec des fabricants automobiles, on est un Tier 2, c’est-à-dire qu’on dessert des pièces à des Tier 1 qui sont reliés au marché automobile. On travaille actuellement à aller chercher l’accréditation que ça prend pour être un fournisseur attitré au niveau automobile », explique M. Pelletier.
« La stratégie qu’on a prise, c’est la stratégie des petits pas, c’est-à-dire commencer par les Tier 2 pour se faire la main, voir c’est quoi les requis, c’est quoi les enjeux. Mais graduellement on est en train de mettre en place ce que ça prend pour être capables de se rapprocher des grands donneurs d’ordres », ajoute notre invité.
Plastiques Gagnon travaille tous les thermoplastiques, soit les plastiques transformables par procédé d’injection. Au menu également : les résines d’ingénierie. Il s’agit de résines qui ont des caractéristiques plus élevées en matière de forces mécaniques ou encore de résistances chimiques.
Écoresponsabilité
Sur son site Web, l’entreprise affirme être le producteur de plastique le plus écoresponsable au Canada.
Cela prend plusieurs formes, notamment par ce qu’ils ne font pas.
« C’est sûr qu’on travaille le plastique, par contre on n’est pas dans le consommable jetable », dit M. Pelletier au sujet de produits tels que des ustensiles ou des couverts alimentaires.
« On se fait un point d’honneur de tenter de valoriser la majorité ou l’entièreté de ce qu’on achète en termes de plastique. Quand on fait des productions, il y a toujours des rejets et on les revalorise au maximum », ajoute-t-il.
Ces rejets sont soit réutilisés à l’interne ou encore vendus à des entreprises pour qui les exigences techniques sont moins élevées.
Tout le carton est recyclé et tout ce qui peut être composté l’est. Même le papier à main des salles de bains après utilisation.
« Au niveau du chauffage, on récupère 100 % de la chaleur de nos procédés pour chauffer l’usine. Dans l’usine ici il n’y a pratiquement aucun élément de chauffage, on chauffe vraiment l’usine à partir des équipements de production, donc ça permet de minimiser notre consommation d’énergie de façon assez significative. »
Conductivité et échange thermique
La technologie lithium-ion est présentement la norme pour ce qui est des batteries des véhicules électriques actuellement en production. Elles ont cependant parfois tendance à surchauffer et leur gestion thermique est en voie de devenir un secteur d’industrie en soi.
Plastiques Gagnon n’entend pas laisser passer l’occasion.
« On a une expertise dans les polymères et on a identifié il y a quelques années qu’il y avait un potentiel pour nous de croître à travers l’électrification des transports », confie M. Pelletier.
L’entreprise a été mise en contact avec des chercheurs, avec qui elle s’est éventuellement associée.
Ils travaillent ainsi avec des gens de l’Université Laval à Québec mais aussi avec des spécialistes de l’Université de Sherbrooke.
« C’est vraiment de voir comment on peut développer des résines avec des propriétés différentes de ce qu’on retrouve sur le marché, soit pour aller chercher de la conductivité, soit pour aller chercher de l’échange thermique. Parce qu’on sait que le plastique c’est un isolant mais, dans certaines applications, on voudrait être capables de dissiper de la chaleur », explique le directeur général.
« C’est vraiment tenter d’aller chercher des propriétés au niveau du plastique qui ne sont pas nécessairement des choses qui existent dans les produits qui sont disponibles sur le marché actuellement », conclut M. Pelletier.
Cela démontre que les arts plastiques – ou dans ce cas-ci l’art de maîtriser les plastiques – représentent un champ de recherche et développement voué à un avenir extrêmement diversifié et prometteur.