Avouant d’emblée son inconfort face à un tel exercice, le président du Groupe Canam aura cependant réussi à dérider les convives à plusieurs reprises. Une allocution spontanée, simple, mais combien efficace qui en aura surpris plus d’un.
Avec sa feuille de route impressionnante, Marc Dutil demeure toutefois humble et reconnaît que son succès est dû principalement au concept des quatre dimensions de la vie qu’il prône : la famille, le travail, la communauté et sa propre personne. « Si vous ne redonnez pas à la communauté, il manque quelque chose dans votre vie», lance-t-il. C’est pourquoi, notamment, le dirigeant beauceron s’est impliqué grandement dans l’Association d’intégration sociale, puis a fondé l’École d’entrepreneurship de Beauce.
« On oublie souvent de mentionner dans mon parcours que je suis marié à Catherine Larochelle et que nous avons cinq enfants », mentionne-t-il d’entrée de jeu. D’ailleurs, c’est son fils Joseph, atteint du syndrome de William, qui incite Marc Dutil à s’impliquer autant dans la communauté. « Avec un Joseph dans sa vie, on développe inévitable une fibre protectrice ! »
Fils de Marcel Dutil, fondateur du Groupe Canam-Manac, Marc a suivi l’exemple prodigué par son père, qui est aussi président de la Fondation Catherine de Longpré, qui soutient la Maison du même nom, un centre de soins palliatifs situé à St-Georges.
« Mon père s’y est impliqué à la fin des années 80, lorsqu’il voyait sa mère mourante et refusait qu’elle finisse ses jours dans un hôpital. Pour lui, il s’agissait d’offrir aux personnes en fin de vie une certaine dignité. »
Mais le paternel n’a pas seulement transmis ce besoin d’implication sociale.
« Dès mon jeune âge, j’ai appris à survivre en performant. Quand tu es le fils d’un véritable volcan, tu as tout intérêt à être bon dans tout ce que tu entreprends. Tu apprends à performer. J’ai aussi appris à privilégier l’action. Comme catholique, le Québécois moyen est porté à donner, mais il a aussi le pardon facile envers lui-même. J’ai réalisé, à 19 ans, que c’est par l’action qu’on change le monde, et non par l’intention. »
Marc Dutil a joint les rangs de l’entreprise familiale en 2002. Il en deviendra président et chef de la direction dix ans plus tard. Canam-Manac œuvre dans le domaine des remorques et de l’acier. La famille détient 50 % des actions dans Manac (remorques). Quant au Groupe Canam, l’entreprise a récemment annoncé la réalisation d’une opération de privatisation par un groupe d’investisseurs mené par la famille Dutil.
Bon an, mal an, le Groupe Canam travaille annuellement sur 10 000 projets. D’ailleurs, c’est l’entreprise qui fournit les caissons d’acier dédiés à la construction du nouveau pont Champlain.
« La meilleure production atteinte historiquement chez Canam était de 1,5 caisson par semaine. Avec le pont Champlain, la production atteint 4 à 5 caissons hebdomadairement. »
D’autres projets sont en cours, dont la construction du nouveau stade des Falcons d’Atlanta, de la NFL, et le parc thématique Pandora, le Monde d’Avatar, à Disney World en Floride.
« Nos nombreux projets me forcent à voyager constamment : Chine, Espagne, France, Italie, Allemagne, Pays-Bas, Angleterre, New York, Atlanta, San Francisco … Quand j’avais 40 ans, j’avais hâte d’en avoir 50, pour un peu moins travailler. À 52 ans, je réalise que ces voyages sont nécessaires, car il faut outrepasser l’illusion que procurent les communications électroniques.»
Sans préconiser la semaine de travail de 100 heures, Marc Dutil éprouve beaucoup de respect pour le déséquilibre.
« Ce sont les déséquilibrés qui font grandir les entreprises, pas le zen qui travaille uniquement 32 heures par semaine. La petite demi-heure supplémentaire accordée quotidiennement pour régler deux ou trois problèmes peut faire toute une différence quand elle est répétée 250 fois par année. Il ne faut pas avoir peur du travail !»
Par Richard Marcil