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Ciel gris pour l’industrie manufacturière

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« Ce n’est pas noir ou blanc, mais gris, souligne Joëlle Noreau, économiste principale au Mouvement Desjardins. Certains secteurs sont en croissance, comme ceux des circuits imprimés, des minerais et des concentrés de fer, mais d’autres sont à la baisse, comme ceux de l’aluminium et des alliages ou du papier. »

Cette disparité est attribuable à une panoplie de facteurs, que ce soit la volatilité du dollar, l’évolution du prix des matières premières et de l’énergie, la concurrence des pays émergents, la récession mondiale, les maladies, la restructuration dans le monde des médias et de l’imprimerie, les différentes crises, etc. Bien que vécues par presque tous, ces difficultés n’affectent pas tous les secteurs, ni les entreprises, de la même façon.

« Les entreprises qui vont aux États-Unis ont vu se multiplier les restrictions à l’exportation après les événements du 11 septembre 2001 et lors de la récession de 2008 (ex. : contrôle aux frontières, normes sur le bioterrorisme, ITAR, clauses d’achat de matériel associées au Buy American Act, etc.). Certaines se sont très bien adaptées, d’autres moins », soutient Mme Noreau.

Denis Leclerc, président du groupe Biscuits Leclerc, spécialisé dans les biscuits et les collations, confirme qu’un dollar au pair rend le commerce difficile. « Ce qui nous aide, c’est que nous sommes basés en sol américain. Si j’étais seulement au Canada, ce serait vraiment problématique. »

Les entreprises qui résistent

Pour Audrey Azoulay, directrice des affaires publiques et relations gouvernementales à l’association Manufacturiers et exportateurs du Québec, le constat est simple : les manufacturiers qui s’en sortent sont ceux qui ont pris le taureau par les cornes.

Leurs solutions : innover, investir dans la recherche et le développement et dans l’immobilisation, établir de bonnes stratégies et des alliances. « Le concurrent n’est plus en face. Les entrepreneurs doivent être forts et compétitifs pour y arriver. Il faut de l’investissement pas juste une fois de temps en temps, mais de façon continue », souligne Mme Azoulay.

M. Leclerc abonde dans le même sens. « C’est fini le temps où on faisait le même produit pendant 30 ans. Il faut toujours être au fait des nouvelles tendances et prévoir l’imprévisible. On a toujours continué d’investir, comme dans l’automatisation, pour être plus efficaces. »

Avec la concurrence mondiale et les difficultés de recrutement, les entrepreneurs n’ont d’autres choix que de suivre l’exemple du groupe Biscuits Leclerc en misant sur l’automatisation, mais c’est loin d’être le cas de la majorité des manufacturiers.

Oui, les entrepreneurs investissent dans l’immobilisation – 5 milliards juste en 2012 -, mais ils négligent souvent la robotisation et l’automatisation, comme le démontrent les résultats d’une enquête réalisée en 2011 par le Centre de recherche industrielle du Québec (CRIQ) et le Centre de robotique et de vision industrielle (CRVI), auprès de sept secteurs d’activité.

Selon l’enquête, le pourcentage des opérations robotisées au sein des entreprises sondées (501) était réparti comme suit : 22 % comptaient entre 1 et 25 % de leurs opérations, 5 % entre 26 et 50 %, 2 % entre 51 et 75 % et 1 % entre 76 et 100 %. C’est donc dire que 70 % reconnaissaient ne pas utiliser la robotique.

2013, une année incertaine

Si l’année 2012 peut être qualifiée de moyenne, le paysage de 2013 semble, quant à lui, incertain avec des pertes d’emplois importantes en février. À moins de savoir lire dans une boule de cristal, il est difficile de déterminer de quoi seront faits les prochains mois, comme en témoignent les signaux envoyés par nos principaux partenaires commerciaux.

Aux États-Unis, l’indice ISM manufacturier (directeurs des achats des grandes entreprises manufacturières), qui est généralement précurseur de l’activité manufacturière du Québec, évolue en dents de scie depuis un an.

Les dernières perspectives du ministère des Finances et de l’Économie du Québec prévoient une légère hausse de la croissance, qui passera de 1,0 % en 2012 à 1,3 % en 2013.

Que l’année 2013 soit bonne ou mauvaise, un constat demeure : en 2000, le secteur manufacturier employait plus de 600 000 travailleurs, alors qu’ils étaient moins de 500 000 en 2012, ce qui représente une chute de 20,7 % (- 130 100 emplois) depuis 2000.

Devant ce déclin important, il n’est pas étonnant que Manufacturiers et exportateurs du Québec attende beaucoup de la politique industrielle annoncée par le gouvernement dans son budget de 2013-2014.

Cette politique devrait faire une grande place aux entreprises manufacturières de tous les secteurs et de toutes les régions, serait assortie d’un fonds de 200 millions de dollars et devrait être déposée au cours des prochains mois.

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