Dans son ensemble, le secteur manufacturier québécois demeure encore fragile. C’est du moins ce que constate Joëlle Noreau, économiste principale au Mouvement Desjardins. En 2014, dit-elle, il y a eu très légère amélioration par rapport à 2013, bien que plusieurs secteurs demeurent vulnérables ou ont fait du sur place. Seul, le secteur des équipements de transport s’est démarqué cette année.
Selon une étude du Mouvement Desjardins publiée en septembre dernier, le PIB manufacturier stagne depuis 2010. « L’importance du secteur manufacturier diminue dans l’ensemble de l’économie québécoise. Toutefois, la baisse considérable observée au cours des années 2000 s’est estompée. Depuis la récession, il y a une stagnation autour de 13 à 14 % du PIB total québécois. L’idée selon laquelle le secteur est encore en chute libre ne tient plus la route. À l’image des économies mondiale et américaine qui ont été très hésitantes ces dernières années, l’industrie manufacturière québécoise, prise dans son ensemble, a davantage piétiné qu’elle ne s’est affaissée. »
Joëlle Noreau estime que le secteur aéronautique a subi un dur coup en deuxième partie de l’année depuis l’annonce de l’abolition de 1 800 postes chez Bombardier, dont 900 seulement dans la région de Montréal. « C’est l’un des piliers du secteur manufacturier. Ça ne viendra pas propulser les ventes manufacturières. »
Dans le secteur des mines, qui génère beaucoup d’activités, l’économiste du Mouvement Desjardins note que les opérations reprennent peu à peu, bien qu’elles ne tournent pas à plein régime. « Ce n’est pas cette année que l’on va assister à des développements majeurs. »
Du côté du secteur du bois, tout dépend des marchés des entreprises. Si les exportations sont dirigées vers nos voisins du Sud, les ventes seront meilleures en 2015. Toutefois, dit-elle, « si le bois est écoulé sur le marché québécois ou canadien, il est clair que ce sera moins favorable. Il n’y aura pas de hausses faramineuses en 2014. »
Même portrait dans le secteur de la première transformation des métaux : on ne prévoit pas des résultats à tout rompre en 2014, exception faite si la production est exportée aux États-Unis où la production semble se poursuivre de façon graduelle. 2015 devrait être une meilleure année.
Quant au secteur des pâtes et papiers, les bonnes nouvelles ne sont pas au rendez-vous et rien ne laisse présager que 2014 et 2015 seront meilleures. La demande est toujours à la baisse partout sur la planète.
Pour ce qui est des produits minéraux non métalliques, « on ne s’attend pas à une croissance à tout casser en 2014 compte tenu du nombre de travaux comparable aux années précédentes », ajoute Joëlle Noreau.
Finalement dans le secteur des composantes de produits électriques et électroniques, la croissance n’aura pas été au rendez-vous cette année. La concurrence est très forte et rien ne pourrait justifier une hausse en 2014.
Le seul secteur qui a réussi à se démarquer est celui du matériel de transport. « Lors de la crise économique de 2008, plusieurs entreprises américaines ont tardé à renouveler leur matériel de transport, dont la durée de vie utile était terminée, faute de capitaux.
Or depuis 2012, ce n’est plus le cas et les transporteurs procèdent au remplacement de leurs équipements. Ce qui donne un sérieux coup de pouce à nos manufacturiers québécois », soutient Vincent Dugré, vice-président opérations au Pôle d’excellence québécois en transport terrestre.
Selon Jean Simard, vice-président développement des marchés au Pôle d’excellence québécois en transport terrestre, les prochaines années s’annoncent encore plus prometteuses.
« Outre la livraison prochaine d’une première commande de 268 wagons de métro à la Société de transports de Montréal (STM), plusieurs autres contrats sont sur le point d’être accordés, si ce n’est déjà fait (au moment de la publication de cet article). Deux projets de trains à grande vitesse (TGV) reliant Los Angeles à San Francisco et Boston à Washington devraient entraîner la construction de plus d’une centaine de voitures et entraîner des retombées pour les manufacturiers du Québec. »
L’industrie québécoise des équipements de transport terrestre regroupe plus de 650 entreprises, emploie plus de 31 000 personnes et génère des revenus de plus de 7G$.
2015, une meilleure année ?
La décennie 2000 a été fertile en bouleversements pour le secteur manufacturier québécois. Toutefois, la période post-récession n’est pas encore porteuse de changements majeurs. La saignée de l’emploi semble avoir pris fin, mais le PIB fait du surplace. Depuis trois ans, on a tout de même observé une légère embellie au chapitre des exportations et de l’ouverture générale au commerce extérieur.
En résumé, la dégringolade du secteur s’est passablement estompée. Cependant, certaines grandes nations manufacturières, dont les États-Unis, se sont données de nouvelles assises pour revenir en force après le choc de la crise financière. La question qui se pose est la suivante : les entreprises québécoises auront-elles profité de cette période d’après-crise pour conquérir de nouveaux marchés et augmenter leur compétitivité ou se seront-elles mises à l’abri entre deux âpres combats avec la concurrence ? Les prochaines années permettront d’en juger.
«Le secteur manufacturier québécois demeure encore fragile.» – Joëlle Noreau, économiste principale au Mouvement Desjardins.
La récession a chamboulé le rythme de la production de biens partout à travers le monde. À l’heure actuelle, c’est un peu comme si chaque économie tentait de replacer ses clients actuels tout en tentant de percer de nouveaux marchés.
De toute évidence, le redémarrage de l’économie européenne, la réduction de cadence dans les marchés émergents et la lenteur du secteur manufacturier américain de 2008 à 2013 n’ont pas permis de relancer les opérations québécoises avec vigueur à ce jour.
Les prochaines années permettront de dire si la période actuelle aura servi de pivot pour affermir le secteur manufacturier québécois ou s’il s’agit d’une parenthèse entre deux dures périodes d’affrontement avec la concurrence (de 2000 à 2008 et de 2014 à la fin de la présente décennie) qui, au final, affaiblira davantage la position du Québec.
Quoi qu’il en soit, le succès ne se mesurera pas uniquement à l’aube de l’emploi dans un contexte d’automatisation et de rareté de main-d’œuvre.
Saviez-vous que?
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