De son côté, la maintenance préventive existe depuis plusieurs décennies. Au début, on mettait en place des dossiers d’entretien préventif pour chaque équipement. On instaurait un horaire d’entretien et, peu importait le temps réel d’utilisation de l’équipement, l’entretien était planifié périodiquement et souvent effectué sans raison valable.
Avec l’arrivée de l’informatique, les logiciels de gestion de la maintenance assistée par ordinateur (GMAO) font leur apparition et simplifient la planification de l’entretien. Ils permettent de vérifier quotidiennement les entretiens prévus, visualiser les tâches à effectuer sur plusieurs semaines et, le cas échéant, commander les pièces requises. Certains logiciels commandent même les pièces automatiquement.
Cependant, les commandes sont souvent passées lorsque l’entretien est négligé, faute de temps, ce qui peut occasionner des duplications de commandes. Le planificateur de maintenance doit, par conséquent, annuler la commande de pièces rapidement. Ce dernier est souvent confronté à la rigidité des manuels d’entretien d’équipements qui stipulent une périodicité fixe.
Il doit donc intégrer des données relatives à l’environnement dans lequel on utilise l’équipement, ce qui a comme impact de modifier les périodicités d’entretien. Un environnement poussiéreux ou humide, par exemple, peut entraîner une usure prématurée de certaines pièces. À chaque entretien planifié, les pièces remplacées doivent être analysées de même que leur usure, et la périodicité de remplacement doit être modifiée, si nécessaire.
Selon Étienne Nadeau, ingénieur et président de Gestion Industrielle Maintenance Man de Blainville, l’entretien prédictif prévaut dans les grandes entreprises.
« On tente de prévoir le bris mécanique. Les pièces sont utilisées jusqu’à leur limite de durée de vie. On peut alors cibler les équipements critiques, les pièces les plus sollicitées ou encore celles qui coûtent excessivement cher. Le coût de certains engrenages dans les industries lourdes peut atteindre 50 000 $. Un changement d’huile sur certains compresseurs peut, lui, varier de 7 à 10 000 $ », précise-t-il.
La tribologie, qui étudie les frottements, l’usure et la lubrification, est fort utile dans ces cas, puisqu’elle permet d’analyser adéquatement la dégradation de l’huile et d’éviter des vidanges inutiles.
Il existe d’autres types d’entretien prédictif, dont la thermographie. « À l’aide d’un lecteur à infrarouge, on peut déceler les points chauds dans un panneau électrique, par exemple. La thermographie peut également être employée pour les toitures. On peut alors détecter les zones plus humides, après une averse, signes d’une possible infiltration. Et comme les coûts pour refaire une telle toiture sont prohibitifs (on parle ici de centaines de milliers de dollars), la thermographie devient un instrument fort précieux. Pour ce qui est de la ligne de production, des senseurs d’alignement peuvent détecter toute déviation d’un appareil, quel qu’il soit, qui occasionnerait des défauts de fabrication », poursuit Étienne Nadeau.
Les équipements dont le coût horaire d’utilisation est élevé seront principalement ciblés par un programme d’entretien prédictif ou préventif. Comme la plupart des entreprises font appel à un système de convoyage pour assurer la mobilité de leurs produits, une attention particulière y sera aussi accordée. Les automates qui alimentent la ligne ou procèdent à diverses opérations sur celle-ci seront, eux aussi, considérés.
Le coût de certains engrenages dans les industries lourdes peut atteindre 50 000$.
« Sur toute ligne de production, il existe un équipement qu’on appelle le goulot. Il permet de régulariser l’alimentation entre les diverses étapes de production. Il dicte en outre la vitesse de la ligne de production selon l’équipement le moins rapide qui la compose. Le goulot fera donc l’objet d’un entretien constant, d’une protection accrue », nous explique Étienne Nadeau.
Selon Étienne Nadeau, de plus en plus d’équipements sont dotés d’ordinateurs PLC (Programmable Logic Controller). D’équipements à entraînement mécanique, on est passé aux équipements munis d’un ou de plusieurs servomoteurs. « Grâce aux informations captées par les différents senseurs de la ligne de production, les PLC peuvent en régulariser l’opération.
Au niveau des PME, toutefois, on rencontre encore beaucoup de vieux équipements. Le marché de l’entretien de l’usagé est donc primordial, surtout en temps de récession, où les investissements sont très limités. La maintenance préventive et prédictive prend alors toute son importance, surtout pour ce segment de marché. »